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Archive pour octobre 2007

COMPTE-RENDU FINAL DE LA VISITE DE PAUL BIYA EN FRANCE

Lundi 29 octobre 2007

C’est par un entretien au palais de l’Elysée avec le président français Nicolas Sarkozy que Paul Biya a terminé sa visite en France vendredi dernier. Déprogrammé de son horaire initial (10h), ce tête-à-tête a eu lieu finalement à 16h. Le nouveau président français ayant eu à gérer un agenda très chargé ce jour-là avec la fin du « Grenelle de l’environnement » et surtout un rendez-vous à l’improviste avec les cheminots en grève depuis quelques jours. 

Dans leur entretien, les deux chefs d’Etat ont abordé plusieurs sujets. Selon certaines informations, il a très peu été question de politique ; surtout pas de politique interne camerounaise. Ils ont surtout fait le tour d’horizon des relations bilatérales entre les deux pays. « Nos entretiens ont porté sur une sorte de revue de la coopération bilatérale. Nous sommes parvenus à la conclusion que cette coopération se portait bien » a dit Paul Biya aux médias. 

Poursuivant dans son compte-rendu de son entretien avec son homologue français, le président Biya s’est aussi réjoui du fait que, « l’Afrique compte au rang des priorités du président Sarkozy ». Une affirmation qu’on peut avoir peine à confirmer, tant les exemples et les preuves de cet intérêt affiché de Nicolas Sarkozy pour l’Afrique ne semblent pas patents. On peut néanmoins lui reconnaître la volonté de ne pas trop s’immiscer dans les affaires internes des pays du continent, ce qui en soi, peut être considéré comme un « intérêt affiché ». 

Mais pour le reste, le président français réaffirme quasiment au quotidien qu’il entend promouvoir davantage les relations économiques avec les pays étrangers. Il en a sans doute parlé avec Paul Biya. Et, sur ce terrain, les deux hommes n’ont pas manqué d’aborder le projet de construction d’une voie de chemin de fer entre le Cameroun et
la RCA pour lequel le groupe français Bolloré est candidat. (Lire à ce sujet l’encadré). 

Par cet entretien, le Président Biya mettait ainsi fin à sa visite d’Etat en France commencée mardi 23. Elle l’aura conduit aussi à l’Unesco, où il a tenu un discours à l’occasion de la 34e Conférence générale de cette institution. Des entretiens informels et une rencontre avec le Secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie Abdou Diouf ont également ponctué ce séjour en terre française.     

ENCADRE : Paul Biya et la « Une » de la discorde 

Paul Biya en Une d’un quotidien français. Le quotidien gratuit Matin Plus avait en effet choisi de consacrer sa Une de vendredi dernier au président camerounais avec le titre suivant : « Le président du Cameroun reçu à l’Elysée ». Mais cette initiative a été épinglée par d’autres journaux et des associations de droits de l’homme, notamment Survie. Réagissant le premier, l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur a critiqué cette Une et les articles sur M. Biya à l’intérieur de ce journal. Ce sont des articles de propagande, ont dit en substance les journalistes du Nouvel obs. 

Car en effet, Matin Plus, propriété du groupe Bolloré, a semble t-il pris cette initiative parce que son propriétaire Vincent Bolloré est candidat à un marché juteux au Cameroun. Sachant que c’est ce jour-là même que le président Biya devait être reçu par M. Sarkozy (par ailleurs grand copain de M. Bolloré),
la Une de Matin Plus avait vocation à mettre la pression sur le président français afin qu’il convainque son homologue camerounais de lui accorder la construction de la prochaine ligne de chemin de fer (800 km) entre Yaoundé et Bangui en RCA. 

La présidente de l’association Survie, Odile Biyidi, interrogée à cet effet dit ceci : « Cette une illustre certainement l’utilité de posséder des journaux quand on a des intérêts en Afrique », avant de rappeler plus loin que, M. Bolloré n’est pas un novice dans ce genre de coup et que son groupe est habitué à une certaine « prestation de service aux hommes politiques ». 

La couverture de Vendredi dernier ne dérogeait donc en rien à cette habitude. Pire même, dans l’article d’intérieur, seuls les « mérites » du président camerounais ont été évoqués. On y parle de la volonté du « président camerounais de moderniser le système démocratique de son pays ». Pas un mot sur les élections controversées, ou encore sur les rumeurs de modifications de la constitution affichée par certains thuriféraires du pouvoir pour permettre à Paul Biya de se représenter en 2011. Rien non plus sur les récentes émeutes survenues au Cameroun dont ceux ayant entraîné l’assassinat de deux conducteurs de taxi-motos. En fait, rien qui fâche. 

Nous avions signalé le très faible intérêt des médias français pour la visite officielle de Paul Biya en France. Il est dommage que la seule initiative venue nous démentir, celle de Matin Plus donc, soit entachée d’autant de d’arrière-pensées et de raisons subjectives. 

  

« Orphelins » du Darfour: ce que je crois

Dimanche 28 octobre 2007

Ca commence à ressembler à une sale affaire. Une affaire qui sent même mauvais. Cette affaire, c’est celle des enfants du Darfour qu’une Association française (l’Arche de Zoé) avait voulu « acheminer » en France pour les y faire adopter, au prétexte qu’ils sont orphelins. Une initiative que les promoteurs annonçaient comme une « opération humanitaire » se révèle être à présent un fiasco total. Pire même, c’est désormais une « affaire d’Etat » qui implique la France ainsi que deux pays africains, le Tchad et le Soudan.

Le sujet est brûlant, complexe aussi. Rappelons rapidement le contexte. Des français engagés comme « humanitaires » au Darfour ont été arrêtés au Tchad entrain de tenter d’emmener avec eux une centaine d’enfants africains vers la France à bord d’un avion spécialement affrété. Pour leur défense, ils disent que ces enfants sont des orphelins soudanais, dont les parents sont morts dans la guerre du Darfour. En rappel, signalons que le Darfour est une vaste région à l’ouest du Soudan qui est en proie à un grave conflit depuis quelques années. D’abord interne, il est devenu ensuite un conflit régional opposant en sourdine le Soudan et le Tchad. Il a déjà fait plusieurs milliers de victimes et des millions de déplacés; notamment les femmes et les enfants. 

C’est donc parmi ces enfants déplacés que les membres de l’association l’Arche de Zoé sont venus recueillir une centaine de gamins pour les emmener en Europe. Mais, curieusement, ils ont réalisé cette initiative sans aucune démarche légale, sans autorisation ni du gouvernement français, ni soudanais, ni tchadiens. Arrêtés par les autorités de N’djamena alors qu’ils s’apprêtaient à embarquer pour la France avec ces enfants, 6 membres de l’association et trois journalistes qui les accompagnaient sont depuis retenus prisonniers dans ce pays. Depuis quelques jours maintenant, ils sont donc au centre de cette affaire, qui risque de faire couler beaucoup d’encre et de salive. D’autant plus que, les contours de ce dossier semble être difficiles à cerner.

Accusés d’être des « esclavagistes » des temps modernes, les  »humanitaires » arrêtés ne se sont à ce jour pas montré très convaincants dans leurs explications. On a de la peine à donner du crédit aux différents arguments qu’ils avancent. De fait, la « générosité », « l’humanisme », la « solidarité » envers des pauvres petits orphelins qu’ils mettent en avant pour expliquer aussi leur initiative ne paraissent pas crédibles. Du coup, ils ne sont pas beaucoup soutenus par les autorités françaises; on pourrait même dire qu’ils sont « lâchés » par ces derniers quand on voit comment Rama Yade (nommée par ailleurs pour diriger la Cellule spéciale sur ce sujet), membre du gouvernement met une belle énergie sur les plateaux télé à condamner l’initiative controversée de cette association. Bien plus, ils sont aussi menacés par les autorités des deux pays africains concernés par le sujet; et notamment le Président Idriss Déby en personne. Ce dernier, qui a rendu visite aux enfants en question et aussi aux membres de l’Arche de Zoé arrêtés a donné son sentiment dans cette affaire. Pour lui, ces gens avaient en fait l’intention de « faire partir ces enfants pour les livrer à des réseaux de pédophiles en Europe ou même les tuer et vendre leurs organes ». Le président tchadien est même allé plus loin, car il a insinué que les membres de l’Arche de Zoé ne peuvent, en fait, être que la face visible d’un « réseau » de pédophiles ou de trafiquants d’enfants, venus d’Europe faire leur « marché » en Afrique.

Cette idée peut paraître courte et sotte, mais, à voir la conviction avec laquelle le chef de l’Etat tchadien la martelait à la télé, on ne doute pas à croire qu’elle existe et fait son chemin dans l’esprit de plusieurs de ses compatriotes et même bien au delà. D’où vient-elle? Et, qu’est-ce-qui la soutend? Difficile à dire. Il se pourrait tout simplement que, depuis les médias occidentaux diffusent les affaires de pédophilies survenues dans certains pays européens (Belgique avec l’affaire Dutroux, ou en France et le « scandale » d’Outreau…), ou même encore les histoires d’enfants enlevés et retrouvés morts sans certains de leurs organes, bon nombre d’africains n’hésitent plus à penser que les enfants sont ainsi maltraités en Europe.

En analysant la réaction du gouvernement français, qui s’est désolidarisé de l’initiative de l’Arche de Zoé, et du gouvernement tchadien, qui s’est exprimé par les propos de son président cité supra, quelques intuitions me viennent. Premièrement, j’ai peur qu’un dossier aussi sensible ne finisse pas se traiter simplement par l’agitation et la frénésie des uns et des autres à vouloir, soit ne pas y être mêler (la France), soit profiter de la situation pour des raisons inavouées (le Tchad).

Deuxièmement, il serait temps que, Paris, qui avait certainement connaissance des activités de cette association qui, comme tout le monde peut se rendre compte en rentrant sur leur site Internet (www.archedezoe.fr), qu’elle exerce bien dans cette région depuis un moment. Le projet de faire « adopter » des enfants et particulièrement ceux du Darfour est même bien explicité dans leur page d’accueil. Il serait étrange d’affirmer que dans un pays comme la France où tout semble bien être contrôlé et vérifié, que personne en tout cas dans les arcanes ministériels n’ait eu vent de cette association et de ses activités au Soudan et au Tchad. De ce fait, il serait donc important de dire si, les autorités ont donc souvent « fermer les yeux » sur ce genre d’agissements (ce qui serait grave) ou continuer à dire qu’elles ne savaient rien (ce qui est tout aussi grave).

Troisièmement, il faudrait faire attention à ce que le président tchadien et bien d’autres personnes encore sur le continent ne prennent cette affaire en otage pour des raisons autres que celles qu’elle dégage. Car, dénoncer la chose en elle-même est certainement juste. Mais, parler d’un complot ourdi par des réseaux obscurs et mal intentionnés, comme le fait Idriss Déby, sans en avancer une seule preuve, c’est aller trop loin dans l’accusation sans fondements. Le maître de N’djamena voudrait ainsi faire oublier les problèmes internes liés à ce pays, qui rendent cette situation possible. Vouloir donc l’imputer entièrement aux « européens » comme il le dit si bien, c’est fuir ses propres responsabilités de mauvais dirigeants ayant occasionné, sinon participé à la crise qui fait du Darfour aujourd’hui un lieu sinistre pour beaucoup de personnes, au premier rang desquels les enfants. Comme cette centaine de garçons et filles au centre de ce qui est aujourd’hui « l’Affaire des enfants du Darfour ». Nous y reviendrons au fur et à mesure que d’autres éléments sur les enquêtes en cours seront révélées. 

  

Visite de Paul Biya en France ; rencontre au sommet entre le président et Nicolas Sarkozy

Jeudi 25 octobre 2007

C’est aujourd’hui que le président Biya est reçu par Nicolas Sarkozy au palais de l’Elysée. Le tête-à-tête entre les deux hommes d’Etat est prévu à 10h. Cet entretien sera le point d’orgue de la visite officielle qu’effectue le président en France depuis mardi dernier. Ensembles, ils évoqueront certainement plusieurs sujets. Sur le plan de la coopération, et notamment dans le secteur militaire ; le président Biya devrait remercier son homologue français de l’installation prochaine au Cameroun d’une école internationale de formation au maintien de la paix à Awaé près de Yaoundé, sous l’égide de

la France. Outre cela, les deux présidents conserveront, comme c’est de coutume, sur les relations diplomatiques entre les deux pays ; ici, ils ne manqueront, dans le communiqué final, de saluer la « bonne entente et la cordialité » qui prévaut entre ces deux pays depuis longtemps. Il parait peu probable que, dans le même entretien, Paul Biya et Nicolas Sarkozy abordent des dossiers économiques. Car, le nouveau président français qui se présente tous les jours à l’échelle internationale comme un « négociant » au service de son pays (voir encadré), ne le fera pas avec notre président, tant les débouchées et possibilités d’investir au Cameroun paraissent, en comparaison avec d’autres pays, peu intéressantes. En effet, il n’y a pas de TGV à vendre au Cameroun, comme çà vient d’être le cas au Maroc que le président Sarkozy a visité en début de semaine. De même, il n’y a non plus de contrats pétroliers ni portant sur le nucléaire, comme
la France l’a fait avec
la Libye il y a peu. 

Reste les dossiers sensibles. Comme par exemple celui concernant la sécurité des français au Cameroun. « L’affaire Laurence Vergne » dont nous avons parlé il y a peu, pourrait être au menu des discussions. Aussi, la coopération des autorités camerounaises dans la lutte contre l’immigration clandestine (un sujet très cher au président Sarkozy) ne sera sans doute pas en reste. Le Cameroun étant jugé par les autorités de Paris comme l’un des pays qui coopère le moins dans ce domaine. 

Avec cet entretien à l’Elysée, Paul Biya mettra ainsi fin à sa visite officielle dans ce pays commencée en début de semaine. Au cours de celle-ci, il aura rencontré tour à tour de nombreuses personnalités parmi lesquelles le Secrétaire d’Etat français à la coopération et à

la Francophonie Jean-Marie Bockel et Abdou Diouf, Secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie. Avec l’ancien président sénégalais, le président Biya a discuté des relations entre l’OIF et notre pays. De même, ont-ils également évoqué les travaux de la 34e conférence générale de l’Unesco, ouverte le 16 octobre dernier à son siège à Paris. Le président Biya y a tenu un discours mardi dernier. 

Suite de « l’Affaire Laurence Vergne »; Les médias français s’en saisissent

Lundi 15 octobre 2007

Embourbée en justice, presque clarifiée dans les médias français. Ainsi peut-on résumer  « l’affaire Laurence Vergne », du nom de cette jeune (31 ans) scientifique française assassinée en début de cette année au Cameroun. Depuis le drame, le dossier stagne sur le plan judiciaire ; que ce soit au Cameroun où l’affaire s’est produite, comme en France, où une plainte a été déposée en mai dernier par la famille de la victime. En revanche, dans les médias, camerounais comme français, ce sujet est largement couvert et suivi. Surtout en France où radios, télés et journaux semblent, au fil des articles, révéler la « vérité » dans cette affaire. 

On pouvait le constater en regardant, dimanche dernier, sur TF1, le magazine Sept à Huit. Un reportage de 10 minutes a été consacré à cette affaire. Il y a quelques temps ce sont les journaux écrits qui en avaient parlée. Le Parisien qui consacrait une pleine page à ce dossier le 1er août dernier. D’autres journaux aussi en ont parlé, tels Libération (19 juin), Le Figaro et même Le Monde, premier quotidien d’informations générales du pays, mais aussi des journaux régionaux. 

Tous, ils ont abordé cette affaire, dans un premier temps sous l’angle du fait divers sordide. Dans ce registre, c’est la tristesse et l’émotion de la famille et des proches de la victime qui ont été mises en avant ; (dans le reportage de TF1 par exemple, au début, on pouvait voir les parents de la jeune femme exprimer leur chagrin, feuilleter ses albums de jeunesse…). Par la suite, (suivant les recommandations de la famille ou est-ce pour d’autres raisons ?) les médias ont très vite fait basculer ce sujet dans la rubrique du « scandale judiciaire ». Le point de départ de cette nouvelle catégorisation, si on peut ainsi dire, a été la plainte déposée par la famille Vergne au tribunal de Grande instance de Paris en mai dernier. 

La plainte en question, selon Me Antoine Comte l’avocat de la famille, vise à dénoncer la « lenteur et l’incapacité » de la police et de la justice camerounaise à faire la lumière dans cette affaire. Pire même, elle affirme, sur la base d’informations glanées à « bonnes sources », que les coupables dans cette affaire courent toujours, alors qu’ils sont connus ; que la police camerounaise les protège, et, avec la justice, elles ne sont pas pressées d’élucider ce crime. 

Ces « révélations » puisées à « bonnes sources » nous disions, ont donc été versées à la justice et aux médias hexagonaux. S’il est certain que la justice prendra son temps (le temps de la sérénité certainement) pour mettre au clair ce crime ; en revanche, il est à craindre que, les médias, mus par d’autres raisons (et d’autres intérêts ?) n’aient pas la même patience, ni la même sérénité (comme en témoigne les nombreuses « couvertures » dont nous parlions plus haut) pour éclaircir cette histoire. Pourtant, l’enquête menée au Cameroun a conduit à de premières arrestations et des condamnations. Elle a, selon beaucoup d’avis, été un peu bâclée certes, mais les policiers poursuivent d’autres pistes que celles initiales. En France même, le compte-rendu d’un Conseil ministériel affirme que, contrairement à de nombreuses rumeurs, l’action judiciaire menée au Cameroun s’est déroulée en toute transparence. Apparemment, cela ne suffit pas à calmer les médias français, qui ont décidé de faire, à leur manière, toute la lumière dans cette affaire. Rien que çà. 

TEST ADN ET CONSORTS : le silence gêné des associations africaines de France

Dimanche 14 octobre 2007

Silence total. Voilà l’attitude des principales associations africaines de France dans le débat actuel sur la nouvelle loi sur l’immigration et particulièrement « l’amendement du test ADN ». Pourtant, tous les jours, un nouveau rebondissement intervient dans cette affaire polémique et controversée. Il n’y aurait pas assez de place ici pour conter les différentes déclarations de personnalités publiques (connues ou moins connues) sur ce sujet. Les derniers en date étant notamment ceux de François Fillon et de Fadela Amara. 

Le premier, premier ministre en exercice, a qualifié l’amendement querellé (celui sur le Test ADN) de « détail ». Or, ce substantif est dans ce pays très connoté, depuis que Jean-Marie Le Pen avait qualifié ainsi l’Holocauste pendant
la Deuxième guerre mondiale. Le leader du parti d’Extrême-droite avait justement été condamné pour l’utilisation de ce terme et les arrière-pensées qu’il colportait. Que M. Fillon utilise le même terme aujourd’hui devrait le rendre condamnable également. Et, au vu de la fonction qu’il occupe, de manière plus sévère. 

Quant à Madame Amara, Secrétaire d’Etat au Logement, elle a jugé ce sujet, comme du reste le traitement de l’immigration par
la Droite et
la Gauche, est « dégueulasse ». Là encore, un terme  (un qualificatif cette fois-ci). Mais dans le fond, la même expression d’un sentiment d’indignation, mais aussi d’accusation. Sa réaction a provoqué dans la classe politique et médiatique une levée de bouclier contre cette sous-ministre ; aussi bien du gouvernement de Droite (qu’elle a rejoint), mais aussi tout de
la Gauche (qu’elle a quittée). Chacun essayant de placer à son compte, le mot qui ferait mal, la phrase qui tue. 

Avant ces deux épisodes, et même après, pas un jour ne passe sans que le sujet sur les Test ADN ne crée donc une polémique vive dans ce pays. Mais, curieusement, les premiers concernés, c’est-à-dire les africains, ne semblent pas vouloir ou pouvoir se mêler au débat. Certes, on a entendu çà et là, quelques réactions (des bruits en fait) de la part de certains dirigeants africains. Les présidents Alpha Oumar Konaré (l’UA), Abdoulaye Wade (Sénégal) notamment ont exprimé leurs réticences sur les nouvelles lois sur l’immigration et surtout les Test ADN.  Dans un entretien à RFI, le premier cité a jugé que, « pour nous (les africains) ces test ADN sont inconcevables. Ils sont inacceptables au niveau éthique, moral et culturel ». 

Pour leur part, les africains de France sont inaudibles voire muets sur le sujet. En effet, ni le Cran, ni le Collectif Dom, ni toutes les associations de banlieues aussi n’arrivent à faire entendre leur voix dans ce débat. Et que dire des petites associations à caractère national ou communautaire (du genre, les étudiants maliens ou sénégalais ou camerounais de France) ? Or, quand il s’agit de sujets mineurs ou sans intérêts, on les entend gloser à longueur de journée sur les antennes. Débitant de idées à peine construites ou tout au moins qui peuvent être mises en pratique. Seules à ce jour, quelques une association comme Africagora (un club de d’entrepreneurs d’origine africaine et antillaise), dont les responsables ont « roulé » pour le nouveau président, arrive à s’exprimer sur ce sujet. Globalement, elle est d’accord avec la politique de Nicolas Sarkozy, et, même si elle a mis quelques bémols au sujet des Test ADN, elle approuve les autres points du projet de loi en cours, comme les quotas, l’immigration choisie…. 

Pour le reste, quand on parle avec certains africains dans les rues de Paris, ils sont d’avis partagés sur ces sujets. Pour la plus grande part, ils ne se prononcent pas. Par manque d’informations, certainement ; ou encore, parce que, comme beaucoup, ils préfèrent vivre entre-eux, et, ne pas trop s’intéresser à l’actualité politique et administrative de ce pays. Sauf quand çà les intéresse eux-mêmes dans leur singularité. Pour d’autres, comme Georges N, camerounais qui exerce comme taxi à Paris, avec les nouvelles lois, on atteindra bientôt le paroxysme du rejet. Lui, il vit en France depuis sept ans, et, l’année dernière, il a fait venir sa fille du Cameroun dans le cadre du regroupement familial. Il dit ceci : « cela m’a pris près de trois ans pour tout organiser, fournir des nombreuses pièces. Çà s’est bien terminé puisque ma fille m’a rejoint ici, mais çà été très difficile. Je présume que, si en plus de la procédure qui existe déjà, on doit ajouter d’autres éléments, çà va être pire ». Son cas n’est pas isolé ; plusieurs personnes sollicitant la venue d’un de leurs enfants en France dans le cadre du regroupement familial l’a certainement vécu. Comme lui, ils jugeront donc que, s’il faut en plus passer le test ADN, ce serait « insupportable et inadmissible ». 

Un jugement que, malheureusement, n’arrivent pas à avoir ou à faire entendre les grandes associations des africains de France. Comme une autre preuve de leur inconsistance, ou de leur marginalisation ? 

Ce que je crois

Jeudi 11 octobre 2007

L’actualité de ces derniers jours, en France, fait toujours une place belle et nette à l’immigration. Et plus précisément sur cette histoire de « test ADN ». Sur ce sujet, je me suis exprimé dans ce blog et dans d’autres colonnes. J’ai rendu compte, sans trop donner mon avis profond, de ses pérégrinations au parlement, des polémiques qu’il a créées et bien d’autre encore. C’est un sujet proprement délicat et sensible aussi. A ce jour, il a suscité pas mal de querelles, et charrié aussi beaucoup réactions, parfois très caricaturales.

Ce que je pense de ce texte? Que c’est quelque chose de dangereux. Simplement rédigé sur papier en ce moment, il a déjà suscité beaucoup de querelles. Qu’en serait-il s’il venait à être appliqué? Sincèrement ce serait pire encore. Quand je me réveille le matin, et que j’entends aux infos radio cette histoire de Test ADN et ces derniers rebondissements, çà me met mal à l’aise. Un malaise d’autant plus compréhensible que, je me dis, c’est sur des personnes étrangères comme moi qu’on veut pratiquer ce truc. Sans le justifier par aucun argument de raison si ce n’est celui de les discriminer ou de les humilier. Car, comment ne pas, pour « freiner » l’immigration familiale en France (c’est semble t-il ce à quoi doit servir ce test génétique) envisager autre chose que ce procédé? Pourquoi ne pas faire confiance à l’ensemble des mesures déjà suffisamment contraignantes et difficiles qui existent déjà? Pourquoi créer une nouvelle source d’humiliation après les différentes épreuves auxquels les candidats à l’immigration font face dans les consulats, ou…en mer et/ou dans le désert du Sahara?

Chaque matin donc, je traîne un malaise provoqué par ce sujet. Malaise qui commence au pied du lit et se poursuit jusqu’au boulot; en passant par la salle de bain, et dans les transports en communs aussi, que j’emprunte tous les jours. Souvent, je regarde mes compagnons de voyage de manière gêné, perturbé même. J’ai envie de crier, de leur dire, ce pays est entrain de prendre une mauvaise voie. On ne peut pas laisser faire cet ignoble projet de piqûre, heu Test ADN; il faut le dénoncer, pacifiquement, mais vigoureusement. Il faut s’en offusquer, chacun à sa manière et partout où on peut. On a le droit de dire qu’on ne veut plus d’immigrés, mais on n’a pas le droit de dire qu’on va faire un test pour savoir qui est le père de qui, ou qui est la mère de qui, juste parce que certains enfants veulent venir en France. Le fait-on pour les français? Même pour ceux qui s’en vont adopter? Ou encore, on en parle moins, pour ceux qui, tels des négriers partent chercher dans les pays pauvres les futurs champions sportifs, les acteurs culturels et autres scientifiques qui redoreront le blason de ce pays?

Au final, sur le même document, il y’ aurait donc un double regard; avec notamment les « bons » états civils pour les sportifs et autres talents, et, les « mauvais », « faux » états civils pour les enfants candidats au regroupement familial. C’est sans doute cela la nouvelle vision sur l’immigration; la fameuse « immigration choisie ». Vu comme c’est parti, à travers ce « vrai » premier dossier, on va certainement touché des sommets. Les immigrés vont devoir avaler d’autres couleuvres, je dirai même plutôt des pythons.

 

 

Le test ADN ressuscité

Jeudi 4 octobre 2007

D’abord voté, ensuite supprimé, puis (re)voté. Voilà à ce jour les différentes décisions prises au sujet de « l’Amendement Mariani » portant sur l’instauration d’un test ADN pour les futurs candidats au regroupement familial en France. Un itinéraire en trois temps donc, dont le troisième épisode s’est écrit hier 3 octobre avec un nouveau vote, cette fois-ci, en faveur de l’amendement. Les sénateurs l’ont en effet adopté à une majorité relative (176 voix contre 138). Il y a un peu plus d’une semaine,
la Commission des Lois de l’Assemblée nationale avait voté pour l’instauration ; mais quelques jours plus tard,
la Commission des Lois du Sénat l’a supprimée. On pensait alors le dossier clos, et l’Amendement Mariani jeter définitivement aux oubliettes. Que non ! Hier, les sénateurs réunis en session plénière en ont donc décidé autrement. Pourquoi ce revirement ? Que s’est-il passé entre temps ? Y’aura-t-il un nouveau rebondissement dans ce dossier qui passe de plus en plus pour une « affaire » ? 
Les réponses sont assez simples. La première vient du « poids politique » donné à ce dossier. Le président Sarkozy avait fait de la lutte contre l’immigration clandestine et la maîtrise des flux migratoires un dossier prioritaire de son quinquennat. Tous les moyens sont donc bons pour arriver à cet objectif. Ainsi, dans la bataille qui a opposé les adversaires à cet amendement cité plus haut (essentiellement les députés de l’opposition et quelques-uns de la majorité) et ses supporters, l’exécutif a pesé de tout son poids. Hors le ministre de tutelle, Brice Hortefeux, le Premier ministre François Fillon est lui-même monté au créneau pour « convaincre » les parlementaires de voter pour ce texte. Message bien compris par ces derniers, qui, même en traînant les pieds, ont donc accepté de voter. Une autre raison pourrait être les « retouches » apportées à la mouture initiale de ce texte par les services du ministre de l’Immigration. Cette nouvelle version indique que, le Test ADN sera « volontaire », et non plus « proposé » aux candidats. Il sera aussi appliqué aux uniquement aux femmes et aux enfants, et non plus au « chef de famille » qui, selon, les mots d’un défenseur du texte, n’aurait pas à « connaître la surprise désagréable de constater par exemple que ses enfants ne sont pas…ses propres enfants ». D’autres modifications mineures ont aussi été apportées à cet amendement, sans pour autant le rendre plus lisible et même, bien accepté dans l’opinion. En effet, les soubresauts observés jusqu’ici sur ce texte montrent bien qu’il est complexe, et, pour le moins, sujet à disputes et polémiques. La classe politique, les milieux associatifs aussi, et même au sein des chercheurs, universitaires, professionnels de la santé (médecins, psychiatres, psychanalystes) les réactions ont été, et continuent même d’être antagonistes sur ce sujet. Même au sein de la communauté africaine en France, qui n’est pas en reste de cette affaire, puisque c’est essentiellement contre les africains que ce texte est dirigé (lire article à paraître lundi). Les médias aussi se sont émus de cette affaire, et, pour beaucoup, ont publié des pétitions des associations opposées à l’amendement en question. Mais comme d’habitude, dans ces cas, c’est toujours au politique d’en prendre la décision finale. Laquelle décision est, pour l’instant, favorable à cet amendement. Avant un nouvel épisode ? 

COMMENT LE CAMEROUN MAINTIENT-IL A LA MARGE DES DROITS SES CITOYENS DE LA DIASPORA

Mardi 2 octobre 2007

Hors le Cameroun, pas de droits. Ainsi pourrait-on résumer la situation des camerounais de la diaspora. En effet, qu’ils soient installés en Afrique, en Europe ou dans d’autres coins du monde, les camerounais de la diaspora sont privés de deux droits importants. Il s’agit du droit de vote et du droit à la double nationalité. 

Commençons par le deuxième, la double nationalité. Un camerounais qui prend une autre nationalité perd de fait et de droit sa nationalité camerounaise. En effet, aussi bête que cela puisse paraître, un article de la loi fondamentale du pays l’exprime clairement. Il s’agit de l’article 31 de la loi du 11juin…1968 qui stipule que, « (…) perd la nationalité camerounaise, le Camerounais majeur qui acquiert ou conserve volontairement une nationalité étrangère, et celui qui, remplissant un emploi dans un service d’un organisme international ou étranger, le conserve nonobstant l’injonction, faite par le gouvernement camerounais, de le résigner faite ». 

En ce qui concerne le « droit de vote », il n’y a pas texte de loi qui officialise l’exclusion des citoyens camerounais de la diaspora des élections. Mais, ceux-ci ont toujours été écartés des différents processus électoraux organisés dans le pays. Que ce soit à l’ère du parti unique ou même depuis le retour du « multipartisme » au début des années quatre-vingt-dix. Pourquoi ? Aucune raison officielle du côté des autorités nationales. 

Avec ces deux « exclusions », le Cameroun est certainement l’un des rares pays au monde où ses citoyens sont victimes de ce genre de pratiques. Anachroniques, discriminatoires aussi, elles sont également infondées en droit. Car, quelque soit les dispositions de droit international, il n’est pas possible que des individus soient privés de tels droits primaires. Mais, « le Cameroun c’est le Cameroun », comme on a coutume de le dire à Douala, Yaoundé et dans les autres villes du pays. Un pays pas comme les autres. Où, certaines choses inexplicables ailleurs, semblent être admises par les gens, qui le font en plus sans rechigner, limite même avec le sourire aux lèvres. Sans même lever le petit doigt, avec en prime ce fatalisme bien local, ponctué par le fameux «on va faire comment ? ». 

Depuis quelques années, des initiatives se font pour obtenir la « levée » de ces interdictions. Pas au pays, mais essentiellement à l’Etranger. En France et en Grande-Bretagne par exemple, des associations de camerounais s’organisent, chaque fois qu’elles le peuvent, pour manifester contre ces mesures. Ils souhaitent que la double nationalité et le droit de vote puissent être reconnus à tous les camerounais sans exclusive. Certes, leurs revendications sont encore brouillonnes et parfois peu relayées par les grand médias. Mais, la détermination que certains affichent à ce sujet laisse penser qu’ils la poursuivront pendant longtemps. Mais à quoi devrait servir des manifs à l’étranger, même organisée par des camerounais, si elles ne rencontrent pas un écho au pays ? Que faire (à l’intérieur comme à l’extérieur du pays), pour pousser le pouvoir politico-administratif du pays, jusqu’ici sourd et muet sur ces questions, à lâcher du lest ? Comment faire par exemple, pour montrer à ce pouvoir-là que la jouissance de ces deux droits par les camerounais, pour le pays tout entier, en termes d’investissement, de mobilités, de dynamisme économique, culturel… ? On peut dérouler ainsi, sur ces sujets, une multitude d’interrogations, qui ne trouveront réponses que dans la volonté des autorités de ce pays de mettre fin à ces interdictions. Bientôt ?