TEST ADN ET CONSORTS : le silence gêné des associations africaines de France

Silence total. Voilà l’attitude des principales associations africaines de France dans le débat actuel sur la nouvelle loi sur l’immigration et particulièrement « l’amendement du test ADN ». Pourtant, tous les jours, un nouveau rebondissement intervient dans cette affaire polémique et controversée. Il n’y aurait pas assez de place ici pour conter les différentes déclarations de personnalités publiques (connues ou moins connues) sur ce sujet. Les derniers en date étant notamment ceux de François Fillon et de Fadela Amara. 

Le premier, premier ministre en exercice, a qualifié l’amendement querellé (celui sur le Test ADN) de « détail ». Or, ce substantif est dans ce pays très connoté, depuis que Jean-Marie Le Pen avait qualifié ainsi l’Holocauste pendant
la Deuxième guerre mondiale. Le leader du parti d’Extrême-droite avait justement été condamné pour l’utilisation de ce terme et les arrière-pensées qu’il colportait. Que M. Fillon utilise le même terme aujourd’hui devrait le rendre condamnable également. Et, au vu de la fonction qu’il occupe, de manière plus sévère. 

Quant à Madame Amara, Secrétaire d’Etat au Logement, elle a jugé ce sujet, comme du reste le traitement de l’immigration par
la Droite et
la Gauche, est « dégueulasse ». Là encore, un terme  (un qualificatif cette fois-ci). Mais dans le fond, la même expression d’un sentiment d’indignation, mais aussi d’accusation. Sa réaction a provoqué dans la classe politique et médiatique une levée de bouclier contre cette sous-ministre ; aussi bien du gouvernement de Droite (qu’elle a rejoint), mais aussi tout de
la Gauche (qu’elle a quittée). Chacun essayant de placer à son compte, le mot qui ferait mal, la phrase qui tue. 

Avant ces deux épisodes, et même après, pas un jour ne passe sans que le sujet sur les Test ADN ne crée donc une polémique vive dans ce pays. Mais, curieusement, les premiers concernés, c’est-à-dire les africains, ne semblent pas vouloir ou pouvoir se mêler au débat. Certes, on a entendu çà et là, quelques réactions (des bruits en fait) de la part de certains dirigeants africains. Les présidents Alpha Oumar Konaré (l’UA), Abdoulaye Wade (Sénégal) notamment ont exprimé leurs réticences sur les nouvelles lois sur l’immigration et surtout les Test ADN.  Dans un entretien à RFI, le premier cité a jugé que, « pour nous (les africains) ces test ADN sont inconcevables. Ils sont inacceptables au niveau éthique, moral et culturel ». 

Pour leur part, les africains de France sont inaudibles voire muets sur le sujet. En effet, ni le Cran, ni le Collectif Dom, ni toutes les associations de banlieues aussi n’arrivent à faire entendre leur voix dans ce débat. Et que dire des petites associations à caractère national ou communautaire (du genre, les étudiants maliens ou sénégalais ou camerounais de France) ? Or, quand il s’agit de sujets mineurs ou sans intérêts, on les entend gloser à longueur de journée sur les antennes. Débitant de idées à peine construites ou tout au moins qui peuvent être mises en pratique. Seules à ce jour, quelques une association comme Africagora (un club de d’entrepreneurs d’origine africaine et antillaise), dont les responsables ont « roulé » pour le nouveau président, arrive à s’exprimer sur ce sujet. Globalement, elle est d’accord avec la politique de Nicolas Sarkozy, et, même si elle a mis quelques bémols au sujet des Test ADN, elle approuve les autres points du projet de loi en cours, comme les quotas, l’immigration choisie…. 

Pour le reste, quand on parle avec certains africains dans les rues de Paris, ils sont d’avis partagés sur ces sujets. Pour la plus grande part, ils ne se prononcent pas. Par manque d’informations, certainement ; ou encore, parce que, comme beaucoup, ils préfèrent vivre entre-eux, et, ne pas trop s’intéresser à l’actualité politique et administrative de ce pays. Sauf quand çà les intéresse eux-mêmes dans leur singularité. Pour d’autres, comme Georges N, camerounais qui exerce comme taxi à Paris, avec les nouvelles lois, on atteindra bientôt le paroxysme du rejet. Lui, il vit en France depuis sept ans, et, l’année dernière, il a fait venir sa fille du Cameroun dans le cadre du regroupement familial. Il dit ceci : « cela m’a pris près de trois ans pour tout organiser, fournir des nombreuses pièces. Çà s’est bien terminé puisque ma fille m’a rejoint ici, mais çà été très difficile. Je présume que, si en plus de la procédure qui existe déjà, on doit ajouter d’autres éléments, çà va être pire ». Son cas n’est pas isolé ; plusieurs personnes sollicitant la venue d’un de leurs enfants en France dans le cadre du regroupement familial l’a certainement vécu. Comme lui, ils jugeront donc que, s’il faut en plus passer le test ADN, ce serait « insupportable et inadmissible ». 

Un jugement que, malheureusement, n’arrivent pas à avoir ou à faire entendre les grandes associations des africains de France. Comme une autre preuve de leur inconsistance, ou de leur marginalisation ? 

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