Archive pour avril 2008

ADIEU CESAIRE, ADIEU GRAND POETE, ADIEU GRAND HOMME

Vendredi 18 avril 2008

Césaire est Mort aujourd’hui en Martinique. Sa disparition, comme on peut l’imaginer est une grande perte pour beaucoup de monde (ultra-marins, africains, déshérités du monde entier, écrivains, défenseurs des droits de l’homme, « nègres »…). Nombreux seront ceux qui lui rendront un hommage appuyé après sa disparition. J’esquisse ce mouvement ici.

J’ai découvert Césaire il y a quinze ans environ. C’était en classe de seconde, où, un de ses livres (Cahier d’un retour au pays natal) était inscrit à notre programme de français. Depuis cette date, je ne l’ai jamais quitté. Parce que son oeuvre m’a parlé. Parce que sa pensée, sa vie aussi, m’ont séduit. J’ai lu Césaire, j’ai adoré lire les ouvrages qu’il a écrit, les tribunes qu’il a publiées, les interviews qu’il a données aussi. Je ne citerai pas tous ce que j’ai lus de lui. Mais entre le Discours sur le colonialisme, Une Saison au Congo, Cahier…, plus d’une dizaine de livres lus et relus parfois jusqu’à dix fois comme le fameux Discours sur le colonialisme.

La pensée de Césaire, peuvent dire ses détracteurs, étaient une pensée du début du siècle dernier. Ses idées, pas en cohérence avec le monde d’aujourd’hui, car, dans la majorité, elles étaient des idées de « combat », d’affrontement entre les « sans voix » et les autres, entre les « nègres » et les blancs. Soit. C’est un choix qu’il a fait quand il a commencé à écrire et à structurer sa pensée intellectuelle au début des années trente. C’est un choix qui s’imposait aussi si on regarde bien le contexte de l’époque, où la Colonisation (son pire cauchemar) était encore en vigueur. Mais qui peut dire que de nos jours la pensée de Césaire n’est plus d’actualité? Qui peut dire que Césaire est un homme du passé, à l’heure où dans les facs, les lycées et les collèges de France et de plusieurs pays, ses poèmes et pièces de théâtre sont enseignés? Bien plus même, alors qu’il a été visité, courtisé, choyé par les principaux ténors de la scène politique française dans la dernière campagne présidentielle (Ségolène Royal en avait même fait le Président d’honneur de son comité de campagne), qui peut dire que Césaire était encore un marginal, un « has been »? Pas grand monde.

Pas grand monde comme peuvent le confirmer les nombreux hommages qui lui ont été adressés hier. Dans la classe politique, chacun y est allé de son petit couplet. Des anciens présidents (Giscard et Chirac) à l’actuel, des leaders de Droite comme de Gauche, et même dans les partis d’extrême ou Olivier Besancenot du côté Gauche et Jean-Marie Le Pen à l’extrême droite n’ont pas manqué de s’adresser à la presse sur la mort de Césaire. Il y avait beaucoup de fausses bonnes réactions, de vraies tartufferies aussi; Certains auraient même mieux fait de se taire. Mais, sans doute, l’occasion de « coller à l’actualité » comme on dit dans le jargon médiatique était plus fort, et ils l’ont donc saisie.

Il est néanmoins regrettable que personne n’ait mentionné l’ostracisme politique et intellectuel dont il a été victime. En effet, côté littéraire, pas un grand prix, pas une place d’universitaire dans une des grandes facs de la République, pas une place à l’académie française. Du côté politique, pas une place dans aucun gouvernement, alors même qu’il a été député de la nation pendant…45ans. A l’évidence, Césaire gênait; il a derangé beaucoup de personnes dans le système national. Du fait de ses idées? De sa couleur? Assurément.

Le nègre qu’il était, et qui s’était dit fier de l’être (il faut lire Nègre je suis, Nègre je resterai) s’en est donc allé à presque 95 ans comme son ami et compagnon d’écriture Léopold Sedar Senghor. Après avoir traversé tout le siècle dernier, il était entré dans la modernité du XXIe siècle. Portant avec lui le bilan de ses luttes, de ses combats, de sa vision du monde. Des générations de « nègres » et bien au delà auront su reconnaître, à travers son oeuvre que c’était un grand homme. Un génie.

Alors comme moi, ils doivent être entrain de lui dire, va grand homme; va génie du monde; va reposer dans les douces prairies de la terre d’Afrique, des Antilles, du Monde. Va contempler avec Senghor et avec d’autres les astres luisants qui brillent à jamais pour ceux qui « marchent dans la nuit des temps » comme tu le disais toi-même. Va reposer ton corps de poète, ton âme de militant après toutes les luttes pour nous que tu as menées. Va rejoindre les autres anticolonialistes, anti-exploitants des pauvres. Va te reposer en paix. Va… 

MENDICITE ; les mendiants dans les gares et les transports en commun à Paris

Lundi 7 avril 2008

La scène pourrait rappeler une de celle qu’on voit au carrefour Warda à Yaoundé ou d’un autre carrefour de Douala, au Cameroun, avec leurs nombreux mendiants. Pourtant on est à Paris. Gare de Châtelet-Les-Halles, l’un des points névralgiques de la ville, situé dans le 1er arrondissement de la capitale française. Au bas d’un escalier roulant, se tient une femme avec trois enfants. Le plus âgé doit faire 4 ans, alors que le plus jeune, dans les bras de sa mère, à peine 1 an. La femme est assise au sol. Devant elle, une petite pancarte en carton avec un message inscrit dessus. On peut y lire « nous avons faim, aidez-nous ». Elle fait la manche. De temps en temps, elle interpelle les passants, dans un français approximatif, pour décliner oralement le même message. Dans d’autres endroits de cette grande gare, il y a d’autres personnes comme elle. Ce sont en général des femmes, avec des enfants, mais aussi parfois seules. Ce sont des mendiants « immobiles », car ils se tiennent dans un lieu fixe pour chercher leur pitance journalière. 

Il existent aussi des « mendiants mobiles ». Notamment dans les trains. Dans les rames qui passent de manière récurrente dans l’une des nombreuses lignes de cette gare (3 lignes régionales, 5 métros) à la desserte d’autres lieux de Paris ou de sa région, d’autres personnes font également la manche. Ce sont surtout des hommes. Il y a ceux qui interpellent oralement les passagers. Leur message est à peu près celui-ci : « Bonjour messieurs et dames. Excusez-moi de vous dérangez pendant votre voyage. Je suis actuellement sans abri ni travail et j’ai des difficultés pour me nourrir. Si certains d’entre-vous voudraient bien me dépanner d’une petite pièce ou d’un ticket restaurant, cela m’évitera de passer la journée sans rien manger». Eux, ce sont les « mendiants mobiles parlant ». Ils sont sans doute français, si l’on se réfère à leur niveau de langue. 

On distingue aussi des « mendiants mobiles non parlant ». Ce sont des personnes qui ne s’expriment pas ou très peu en français. Ce sont surtout des étrangers (réfugiés sans doute), venus de pays en guerre (Irak, Afghanistan, Kosovo) ou des peuples nomades et marginaux comme les Roms (tziganes) venus de Roumanie. Eux, ils distribuent des petits tracts aux voyageurs présents dans les wagons. Le message inscrit sur ce tract appelle (« je suis réfugié, j’ai deux enfants, aidez-nous») également à la générosité et à la compassion des voyageurs. 

Enfin, même si ce n’est pas exactement la même chose, il existe aussi des personnes qui sollicitent la charité des gens, mais en échange d’un petit livre (Le guide des bons plans de restos ou de cinés de paris, mots fléchés ou croisés…), ou d’un petit morceau de musique accompagné de leur guitare ou d’un autre instrument. 

  

Ces différents cas (on pourrait multiplier par centaines les exemples) montrent bien que les mendiants foisonnent dans les gares et transports en commun parisiens. Le phénomène n’est pas nouveau, semble t-il. Mais il s’est accru au fil des dernières années. Ceux qui font la manche, qu’ils soient « mobiles » ou « immobiles », « parlant » ou pas, sont de plus en plus nombreux. A quoi le phénomène est-il du ? Quelle est la réaction des usagers et des autorités publiques compétentes ? Qui sont vraiment ces mendiants ? Vivent-ils de cette « activité » ? A ces questions, nous n’avons pas de réponses précises. La seule chose qui est sure, c’est que peu d’entre ces gens sont des africains (d’origine ou de nationalité). 

L’autre certitude sur ce sujet, c’est que la majorité des usagers qui empruntent les transports en commun parisiens (près de 2 millions par jour) sont de plus en plus exaspérés par cette situation. S’il y a bien une petite minorité de personnes qui accèdent de temps à autre à la demande de ces démunis, en leur offrant une pièce d’argent ou un ticket restaurant, beaucoup de voyageurs ne prêtent pas ou plus attention aux mendiants qui les interpellent, d’une façon ou d’une autre. Certains usagers se montrent même désagréables en leur faisant la morale ou en les menaçant du regard ou par des invectives. Pire même, les personnes mécontentes déversent désormais leur bile sur Internet. Ils ont créé plusieurs forums sur la toile pour en parler, comme par exemple www.clubic.com, www.forum-auto.com, www.tizel.free.fr. En observant les sentiments ô combien négatifs développés sur ce sujet, on peut conclure  sans trop de peine que, les mendiants ne sont pas la bienvenue dans les gares et les transports en commun parisiens. D’ailleurs, le sont-ils ailleurs ?    


  

Municipales 2008: la « diversité » encore un peu juste

Mardi 1 avril 2008

Cet article est le prolongement d’un autre que j’ai publié il y a quelques jours sur le même sujet. Il est consultable à cette adresse  http://aubingeorges.unblog.fr/tag/actu-francaise/

Cette fois-ci c’est encore manqué. Ou presque. Le dernier scrutin électoral (les municipales des 9 et 16 mars) n’a pas permis aux citoyens français issus de l’immigration africaine de faire une réelle percée dans la sphère politique nationale. A quelques exceptions près, la plupart des candidats de la « diversité » ont été recalés ou contraints à des fonctions subalternes. Selon les sources du ministère de l’Intérieur, sur  un total de 520 000 élus municipaux, il y a environ 2000 candidats de la diversité ; soit 0,4%. Un chiffre insignifiant donc. 

A l’Ump, le parti au pouvoir, comme au Parti socialiste, principal parti d’opposition, les dirigeants nationaux avaient du mal à aborder le sujet au lendemain du scrutin. L’un comme l’autre avait pourtant promis des mesures audacieuses pour faire éclore des responsables municipaux de la diversité. Ces partis avaient même investis un peu plus de candidats noirs ou maghrébins que dans les précédents scrutins. Mais souvent, c’était dans des circonscriptions ingagnables. Ou alors, dans certains cas où la victoire était possible, le candidat de la diversité investi devait affronter, en plus de ses opposants politiques, un autre candidat de son parti, entré en dissidence. Des dizaines de cas de ce genre se sont multipliés à travers le pays. Ils n’ont pas été tranchés par les directions des partis et ont donné lieu à des affrontements fratricides entre membres du même parti, qui, en tournant au désavantage des candidats de la diversité, ont accentué leur déculottée dans ce scrutin. 

Néanmoins, il faut noter l’élection comme maire d’un arrondissement de la capitale (le 7e) de Rachida Dati, la ministre de la justice, qui avec Samia Ghali, elle aussi d’origine algérienne, élue maire du 8e arrondissement de Marseille (2e ville de France), sont les deux seules personnalités de la diversité maires dans des grandes villes. On pourra aussi citer les quelques adjoints aux Maires des grandes villes comme Paris, Lyon, Marseille ; c’est le cas de la jeune franco-tchadienne de 30 ans Seybah Dagoma, adjointe au Commerce et à l’Artisanat à Paris. Certains de nos compatriotes comme Edmond Kameni (Vélizy-Villacoublay) et Adèle Gauthier (Bonneuil) ont été élus conseillers municipaux. Quant à Six-Emmanuel Njoh que nous avions suivi lors des législatives, il était tête de liste à Vitry-sur-seine, mais a été battu. 

Outre ces personnalités vivant dans les grandes villes, et sur lesquels les feux des projecteurs étaient les plus braqués, il y a aussi quelques candidats de la diversité qui ont réussi à faire leur trou, non sans mal, dans les villes moyennes ou dans les petits villages de campagne. C’est le cas de Kader Atteye, originaire de Djibouti, qui a été élu maire de Morey, un petit village de 200 habitants au Centre de
la France. 

Avant ce scrutin municipal, les grands partis politiques et les médias avaient fait tout un foin sur cette question de la représentation des minorités dans l’échiquier politique. La main sur le cœur, ces responsables juraient de transformer cette élection municipale en un scrutin où les élus seraient « black-blanc-beur » et non plus « blanc-blanc-blanc » comme habituellement. Bien plus, les plus optimistes avançaient aussi comme argument en ce sens la nomination par M. Sarkozy de certaines personnalités d’origine africaine et maghrébine au gouvernement après son élection en mai 2007, notamment les Secrétaires d’Etat Rama Yade et Fadela Amara (originaires du Sénégal et de l’Algérie) et surtout Rachida Dati (Maroc-Algérie), ministre de
la Justice et n°5 dans l’ordre de préséance gouvernemental. Ces nominations avaient été présentées comme signal fort adressé au enfants de l’immigration afin qu’ils comprennent qu’eux aussi pouvaient tutoyer les sommets de la sphère politico-administrative. Dans cet ordre d’idée, les dernières municipales étaient donc l’occasion idéale pour consolider les « avancées » symbolisées par lesdites nominations. Hélas, comme l’attestent les chiffres cités plus haut, cela n’a pas été le cas. Ces municipales n’ont pas été le scrutin des miracles. Et, encore une fois, de nombreux français issus d’origine africaine vont devoir patienter pour que « l’égalité républicaine » tant claironner dans ce pays devienne effective dans les urnes. Il y a encore du chemin à faire. 

 

 

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