Il y a un an, Nicolas Sarkozy était élu triomphalement (53%) par les français à la présidence de la République. Douze mois plus tard, que peut-on dire de cette première année de gestion du pays? Pas grand chose et beaucoup à la fois. Pas grand chose parce que, le mandat pour lequel il a été plébiscité (le mot n’est pas fort) est de 5 ans. Et en un an, il n’est même pas encore à mi-parcours. Il serait donc illusoire et même maladroit de le juger sur un temps si court alors que le meilleur ou le pire (c’est selon) peuvent arriver après. On pourrait aussi dire beaucoup de chose car, son élection s’est réalisée dans une espèce de liesse démocratique populaire (plus de 85% de participation, Record), qui, naturellement ont créé des attentes nombreuses chez les français. En plus, son accession à la présidence de la République était la continuité quasi-logique d’une carrière politique menée tambour battant, au cours de laquelle il aura trusté la plupart des grands postes de responsabilités de ce pays (maire, député, président de conseil général, président de parti, plusieurs fois ministres dont Intérieur, Budget, Economie…). Enfin, élu pour faire (bouger la France » selon ses propres termes, il avait aussi décidé de sortir de la posture de « président-arbitre » pour être « président-acteur ». En cela, en un an, il devrait avoir réalisé ou non certaines actions. Est-ce le cas?
Je proposons ici une modeste lecture de ce que j’ai pu observer de cette première année de mandat de Nicolas Sarkozy à l’Elysée sur trois points: à l’international, en politique intérieure, et en librairie.
SARKOZY AN I : le bilan à l’international
30. C’est environ le nombre de déplacements officiels que Nicolas Sarkozy a effectué à l’étranger depuis son élection il y a un an. Dans ce nombre, on compte moins d’une dizaine de séjours en Afrique (Libye, Algérie, Maroc, Tunisie, Sénégal, Gabon, Afrique du Sud). Le président français snoberait-il le continent noir ? Officiellement non, même si, de manière officieuse, il a toujours été confessé que l’Afrique n’était pas sa tasse de thé. Soit.Mais, s’il n’est pas allé énormément sur ce continent au cours de sa première année de mandat, c’est que, dans le domaine international, Nicolas Sarkozy s’est beaucoup investi dans d’autres régions du monde. Sans doute, en fonction d’une certaine hiérarchisation des priorités.
Ainsi, c’est d’abord l’Europe qui a été explorée. En grande partie grâce à lui, les 27 pays membres de l’UE se sont mis d’accord, le 23 juin 2007, sur un « traité simplifié » pour l’Europe communautaire. Il faut dire que le large rejet (55%) en 2005 du Traité constitutionnel par
la France ne lui donnait pas d’autres choix que de s’y investir prioritairement. En effet, son pays portait par ce rejet, une grande partie de l’échec ou du blocage des institutions européennes pendant 2 ans. Cet accord est sans doute l’une des plus belles réussites internationales de cet cette première année de mandat.
Toujours au chapitre des relations remises en bon ordre, l’alliance Franco-allemande. Même si elle ne battait pas particulièrement de l’aile sous l’ancienne présidence (notamment entre Jacques Chirac et Gerhard Schröder), M. Sarkozy, en recevant officiellement douze (12) fois en un an la chancelière allemande Angela Merkel, a voulu montrer que rien en Europe ne pouvait se faire sans une coopération (très) renforcée entre les deux pays. Le « moteur franco-allemand » tient donc ainsi toujours malgré les différences de style entre les deux leaders.
En plus de son voisin d’Outre-rhin, Nicolas Sarkozy a aussi choyé ses voisins d’Outre-manche, les Britanniques. En campagne électorale, il avait déjà dit vouloir appliquer le modèle économique britannique en France (avec juste 5% de chômage,
la France en compte presque 10%). En visitant ce pays il y a quelques semaines, renouvelé ce vœu. De plus, autant il a été séduit par le Premier ministre Tony Blair (même si celui-ci a quitté ses fonctions peu après), autant son volontarisme est apprécié là-bas à Droite comme à Gauche. Cerise sur le gâteau, sa nouvelle épouse Carla Bruni a séduit les britanniques lors de cette visite.
Ce tour d’horizon des bonnes actions à l’international serait incomplet si on n’évoquait pas le renouveau des relations entre
la France et les États-Unis d’Amérique que M. Sarkozy, atlantiste et fervent admirateur du modèle de vie américain, a entrepris de (re)séduire. Les deux pays étaient fâchés depuis l’épisode de l’entrée américaine en Irak, en 2003, que Jacques Chirac et Dominique de Villepin (alors ministre des Affaires étrangères) avait condamnée. Aujourd’hui, cette brouille appartient au passé et, Nicolas Sarkozy a pu le dire lors de son discours très acclamé au Congrès le 7 novembre 2007. Bien plus, il s’est même engagé à aller plus loin que cette simple « renormalisation » des rapports entre les deux pays en décidant il y a un mois de l’envoi de 1000 soldats français supplémentaires en Afghanistan aux côtés des troupes américaines qui combattent les Talibans dans ce pays.
Hors ces cas sus cités, les autres terrains étrangers que Nicolas Sarkozy a visités n’ont pas été autant de succès. S’il a semblé être dicté par des raisons diplomatiques et/ou économiques dans ses déplacements en Chine, en Inde, en Libye et au Maghreb (Algérie, Tunisie, Maroc) par exemple, il a été en revanche moins regardant sur les problèmes de démocratie, de libertés de la presse et surtout des Droits de l’homme. Lui qui déclarait pourtant dans son discours du soir de son élection vouloir que la « France (soit) aux côtés de tous ceux qui souffrent de l’arbitraire dans le monde » en est encore bien loin. De cette déclaration de principe très idéaliste, le chef de l’Etat français a du se résoudre depuis, bon gré mal gré, à la réalité pratique des relations diplomatiques et tout ce qu’elle comporte de renoncements et désistements.
De même, il a du se résoudre à ce même pragmatisme diplomatique au sujet de l’Afrique noire, et notamment de l’ancien pré-carré français. Juste élu, il avait souhaité la « rupture » d’avec les vieilles pratiques de
la Françafrique. Pourtant, à la première occasion de venir sur notre continent, il est allé rendre à celui qui incarne le mieux ces vieilles habitudes, Omar Bongo du Gabon. Outre cela, il a même réussi à renvoyer en mars dernier, son ministre de
la Coopération (des Affaires africaines) Jean-Marie Bockel, au motif que ce dernier lui avait juste rappelé de tenir son engagement de mettre fin à une certaine vision de
la France en Afrique, incarnée par
la Françafrique ; comme par exemple, l’intervention de soldats français au Tchad pour sauver le régime d’Idriss Déby. Le clou de l’impair ou de la maladresse (pour ne pas dire plus) avec notre continent reste sans conteste son séjour au Sénégal en juillet 2007. dans son discours à cette occasion, devenu le fameux « Discours de Dakar », il avait eu des mots très peu aimables (pour dire le moins) envers « l’homme noir » qui, selon lui « n’est pas assez entré dans l’histoire ». Le Pr Achille Mbembé, dans deux commentaires (qu’on peut lire aux adresses ci-bas), en avait montré toute l’inanité, les contresens, les bizarreries…
Il reste quatre ans au président Sarkozy pour changer ou continuer ( ?) sa gouvernance tant nationale qu’internationale. Il lui reste surtout 4 ans pour changer ou continuer sa politique diplomatique avec le continent africain. Qu’elle soit de « rupture » ou de « continuité » peut importe ; les africains espèrent juste qu’elle soit moins ténébreuse, moins condescendante, moins paternaliste…mais plus claire, plus juste. Et pour y parvenir, 4 ans ne sont pas de trop. Afin de briser son image quasi-détestable qui s’installe dans la jeunesse africaine notamment après le Discours de Dakar. Afin de mettre également la pression, ouvertement, sur les pays africains amis qui boycottent encore régulièrement les principes démocratiques les plus élémentaires comme les élections libres et transparentes. Afin enfin de faire de
la France l’amie de ces pays et non sa tutrice ou son ennemie. Y arrivera t-il ? On en saura un peu plus dans un an, quand il faudra célébrer « l’An II » de Nicolas Sarkozy à la tête de
la République française.
http://www.congopage.com/article4872.html
http://www.africamaat.com/Achille-MBEMBE-demonte-le-mensonge