Drôle d’ambiance au « Restaurant Saumo » ; ce petit établissement de commerce alimentaire situé à la sortie du métro Château d’eau, dans le 10e arrondissement de Paris. Château d’eau (parfois appelé aussi le « boulevard »), c’est aussi l’une des places fortes de la présence camerounaise dans la capitale française. Ici, se réunissent très souvent des dizaines de compatriotes, venus traîner, ou rencontrer des amis, ou encore faire des achats dans l’un des nombreux commerces du coin spécialisés dans les produits africains. En effet, il y a à Château d’eau des salons de coiffures, des boutiques de produits de beauté, restaurants, tenus et gérés par des africains. De nombreux jeunes de chez nous viennent aussi se « débrouiller » dans ce lieu où ils trouvent à peu près tous les petits boulots (coiffure, gardiennage, services…). C’est ici donc que nous sommes allés samedi dernier partager une après-midi olympique avec les gens du « Boulevard », parmi lesquels de nombreux compatriotes.
Drôle d’ambiance cette après-midi du 16 août. Il est 18h30. Le match Cameroun = Brésil comptant pour les ¼ de finale du tournoi de foot des JO s’est achevé 2 h plus tôt sur une défaite de notre équipe. Ici, personne ou presque, n’en parle. Comme si c’était un non événement. C’est à peine s’ils connaissent même les noms de joueurs camerounais ayant pris part au match. Les quelques rares personnes qui ont suivi la rencontre parlent plus de la « nervosité » de nos joueurs et du nombre impressionnant de cartons jaunes qu’ils ont reçus. Preuve de leur désintérêt pour ce match, ils préfèrent évoquer la finale de 100 m et la magnifique victoire du jamaïcain Usain Bolt. « Le gars est fort », avance un colosse à l’accent ivoirien, portant un tee-shirt floqué Côte d’Ivoire (en prévision du match de foot de son pays contre le Nigeria également aux JO). Un autre monsieur parle lui de « l’humiliation des américains qui ne sont plus les rois du sprint ». Hors ces quelques remarques, ce n’est pas la grande disserte sur les JO ici. « Les gens d’autres problèmes, et si c’était la Coupe d’Afrique ou la Coupe du monde foot, tu aurais vu la différence » me déclare un habitué du coin.
S’ils ne parlent pas de JO, les dizaines de personnes présentes ici ne sont pour autant pas muettes. Les « commentaires » vont bon train, sur des sujets aussi généraux qu’inutiles. Certains devisent sur le temps, pas très chaud et pluvieux même, qui règne sur la capitale française en ce moment. D’autres parlent de leurs petites activités. D’autres encore s’essayent même à l’actualité politique du pays, avec les suites de l’« Opération épervier », sans aller plus en profondeur. Çà et là, les gens, réunis par petits groupes devant le « Restaurant Saumo » ou dans les autres officines attenantes zappent d’un sujet à un autre. Le ton est de chez nous, le verbe haut. Des fois, on se croirait à « la rue de la joie » à Douala ou dans un de ses coins populaires de Yaoundé.
Derrière son comptoir du restaurant, Alberto continue son service, sans porter trop attention au brouhaha à l’extérieur de sa boutique. Il prend les commandes de repas (africains exclusivement) et de boissons, encaisse l’argent et sert les clients. A cette heure de la journée, et plus particulièrement le samedi, c’est la grande affluence. Au sous-sol, une petite salle de service existe, dans laquelle est disposé un poste de télévision est pleine. Tout comme sont pleines aussi les tables disposées à l’entrée du restaurant sur lesquelles sont installées des clients consommateurs. A l’intérieur de la pièce, un grand portrait de Samuel Eto’o est exposé dans un cadre, accompagné d’un maillot du Barça au dossard du goléador. Il faut dire que la star passe souvent dans ce lieu. « C’est notre seule star internationale », lance Alberto pour justifier les atours du joueur dans le resto. Il faudra désormais y rajouter ceux de Françoise Mbango, qui a conservé sa médaille d’or olympique en triple saut hier à Pékin. Un exploit qui n’a pas été suivi au Boulevard, en plus du peu d’intérêt pour les JO, le Boulevard est quasiment fermé le dimanche.
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