Je Suis Jeune Donc Je Bois
Encore 2 textes pour conclure ces Chroniques. J’ai pris un peu de temps entre la dernière écrite (la 8e) et celle-ci. Des occupations me mobilisaient ailleurs. Mais dans l’intervalle, j’ai eu quelques retours sur certains des premiers textes publiés. Pour la plupart, ils émanaient de personnes qui lisent habituellement ce blog. Mais, d’autres plus inattendus me sont aussi arrivés; qui venaient de gens qui ont découvert le blog par hasard. Aux uns et aux autres, je les incite à continuer à m’envoyer leurs commentaires que je publierai après modération. Pour ces deux dernières Chroniques, je serai dans une tonalité plus analytique. Car certains m’ont reproché d’être trop descriptif dans les autres textes. Message bien reçu. Voici donc une analyse sur un sujet auquel j’ai été confronté durant ce séjour en terre natale.
Comment s’exprimer, quand on est jeune, dans un pays où la liberté de parole est restreinte? Comment vivre quand, toujours jeune, on est sans revenus, car pas de boulot, pas de job non plus? Comment se projeter dans la vie, envisager un avenir meilleur, quand tout semble (très) compliqué à obtenir, si ce n’est impossible? Comment, enfin, au quotidien, quand on est jeune, vivre alors que la démoralisation et la démobilisation sont les compagnes régulières?
Voilà quelques questions que je suis posé après plusieurs jours de séjour durant ces vacances. Notamment quand j’allais dans mes anciens établissements comme l’université de Yaoundé I. Ici, j’ai rencontré plusieurs amis et camarades. Certains sont encore sur la fac pour, qui une thèse, qui d’autre exerçant une fonction para universitaire dans les abords du Campus. Tous ces amis, et beaucoup d’autres jeunes comme eux, m’ont paru vivre, pour beaucoup, dans une espèce de spleen, de démobilisation, de découragement total.
certains vivent l’esprit tourné vers un ailleurs qui est très loin et qu’ils n’atteindront quasiment jamais; d’autres aspirent à devenir de grands commis de l’Etat national, pour, pensent-ils, devenir des rentiers et autres nouveaux riches. D’autres encore ne se soucient ni de l’une, ni de l’autre de ces deux premières options citées. Ils vivent au jour le jour. Sans calcul, sans prévision, sans ambition même, ni pour eux, ni pour le pays, ni pour personne. Ils ont choisi une autre voie: vivre pour vivre, vivre pour jouir, vivre pour se repaire, vivre pour croquer, tels des épicuriens, tous les plaisirs les plus près d’eux.
Au premier rang de ceux-ci, la boisson. En règle générale, les jeunes camerounais boivent beaucoup. Mes amis ne sont pas en reste, et j’ai pu le vérifier là-bas. « C’est pour tuer l’ennui et noyer nos soucis », se justifient-ils souvent. D’autres vont plus loin et confessent leur amour pour ce qu’ils appellent les « molécules de la joie ». Quand ils boivent, c’est de la bière. Ils en consomment régulièrement de bonne quantité par jour. Or, la bière au Cameroun coûte cher, 500 FCFA (environ 0,80 euro). Comment font-ils pour en être accros alors même qu’ils sont sans le sou? Je n’ai pas eu de réponses à cette question. Mais, il ne faut pas être sorcier pour savoir qu’ils investissent les maigres revenus qu’ils peuvent avoir au quotidien dans leur bouteille de bière. Quand ils ont la chance de rencontrer quelqu’un qui peut leur en offrir une autre, c’est avec joie et enthousiasme qu’ils la prennent. Le « Must » serait bien entendu qu’un généreux donateur leur offre une tournée. J’en ai fait l’expérience.
A terme, quelles peuvent être les répercussions d’une telle conduite sur ces jeunes? J’ai appris que, dans les lycées et collèges des grandes villes, des plus jeunes encore (adolescents) s’adonnaient également aux séances de beuveries régulières aux abords de leur établissement ou ailleurs dans des gargotes; que vont-ils devenir? De joyeux ivrognes? Ou d’alcolos anonymes? Que va être l’incidence de cette conduite sur le développement du pays qui attend autre chose de ces jeunes que leurs prouesses éthyliques? Par quels moyens le gouvernement camerounais va t-il faire pour sortir ces jeunes de la descente aux enfers dans laquelle ils s’enfoncent progressivement par cette addiction à l’alcool?
Je ne sais pas ce que feront les autorités locales. Je sais tout simplement que, si rien n’est fait, plus que la « fuite des cerveaux », l’alcoolisme sera demain l’un des véritables cancers de notre pays. Un mal encore plus violent qu’il frappera et prospèrera à l’intérieur du pays même. Et contre lequel, on ne pourra rien. Si ce n’est constater les dégâts immenses qu’elle aura créés.
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