Archive de la catégorie ‘Actu Française’

TEST ADN ET CONSORTS : le silence gêné des associations africaines de France

Dimanche 14 octobre 2007

Silence total. Voilà l’attitude des principales associations africaines de France dans le débat actuel sur la nouvelle loi sur l’immigration et particulièrement « l’amendement du test ADN ». Pourtant, tous les jours, un nouveau rebondissement intervient dans cette affaire polémique et controversée. Il n’y aurait pas assez de place ici pour conter les différentes déclarations de personnalités publiques (connues ou moins connues) sur ce sujet. Les derniers en date étant notamment ceux de François Fillon et de Fadela Amara. 

Le premier, premier ministre en exercice, a qualifié l’amendement querellé (celui sur le Test ADN) de « détail ». Or, ce substantif est dans ce pays très connoté, depuis que Jean-Marie Le Pen avait qualifié ainsi l’Holocauste pendant
la Deuxième guerre mondiale. Le leader du parti d’Extrême-droite avait justement été condamné pour l’utilisation de ce terme et les arrière-pensées qu’il colportait. Que M. Fillon utilise le même terme aujourd’hui devrait le rendre condamnable également. Et, au vu de la fonction qu’il occupe, de manière plus sévère. 

Quant à Madame Amara, Secrétaire d’Etat au Logement, elle a jugé ce sujet, comme du reste le traitement de l’immigration par
la Droite et
la Gauche, est « dégueulasse ». Là encore, un terme  (un qualificatif cette fois-ci). Mais dans le fond, la même expression d’un sentiment d’indignation, mais aussi d’accusation. Sa réaction a provoqué dans la classe politique et médiatique une levée de bouclier contre cette sous-ministre ; aussi bien du gouvernement de Droite (qu’elle a rejoint), mais aussi tout de
la Gauche (qu’elle a quittée). Chacun essayant de placer à son compte, le mot qui ferait mal, la phrase qui tue. 

Avant ces deux épisodes, et même après, pas un jour ne passe sans que le sujet sur les Test ADN ne crée donc une polémique vive dans ce pays. Mais, curieusement, les premiers concernés, c’est-à-dire les africains, ne semblent pas vouloir ou pouvoir se mêler au débat. Certes, on a entendu çà et là, quelques réactions (des bruits en fait) de la part de certains dirigeants africains. Les présidents Alpha Oumar Konaré (l’UA), Abdoulaye Wade (Sénégal) notamment ont exprimé leurs réticences sur les nouvelles lois sur l’immigration et surtout les Test ADN.  Dans un entretien à RFI, le premier cité a jugé que, « pour nous (les africains) ces test ADN sont inconcevables. Ils sont inacceptables au niveau éthique, moral et culturel ». 

Pour leur part, les africains de France sont inaudibles voire muets sur le sujet. En effet, ni le Cran, ni le Collectif Dom, ni toutes les associations de banlieues aussi n’arrivent à faire entendre leur voix dans ce débat. Et que dire des petites associations à caractère national ou communautaire (du genre, les étudiants maliens ou sénégalais ou camerounais de France) ? Or, quand il s’agit de sujets mineurs ou sans intérêts, on les entend gloser à longueur de journée sur les antennes. Débitant de idées à peine construites ou tout au moins qui peuvent être mises en pratique. Seules à ce jour, quelques une association comme Africagora (un club de d’entrepreneurs d’origine africaine et antillaise), dont les responsables ont « roulé » pour le nouveau président, arrive à s’exprimer sur ce sujet. Globalement, elle est d’accord avec la politique de Nicolas Sarkozy, et, même si elle a mis quelques bémols au sujet des Test ADN, elle approuve les autres points du projet de loi en cours, comme les quotas, l’immigration choisie…. 

Pour le reste, quand on parle avec certains africains dans les rues de Paris, ils sont d’avis partagés sur ces sujets. Pour la plus grande part, ils ne se prononcent pas. Par manque d’informations, certainement ; ou encore, parce que, comme beaucoup, ils préfèrent vivre entre-eux, et, ne pas trop s’intéresser à l’actualité politique et administrative de ce pays. Sauf quand çà les intéresse eux-mêmes dans leur singularité. Pour d’autres, comme Georges N, camerounais qui exerce comme taxi à Paris, avec les nouvelles lois, on atteindra bientôt le paroxysme du rejet. Lui, il vit en France depuis sept ans, et, l’année dernière, il a fait venir sa fille du Cameroun dans le cadre du regroupement familial. Il dit ceci : « cela m’a pris près de trois ans pour tout organiser, fournir des nombreuses pièces. Çà s’est bien terminé puisque ma fille m’a rejoint ici, mais çà été très difficile. Je présume que, si en plus de la procédure qui existe déjà, on doit ajouter d’autres éléments, çà va être pire ». Son cas n’est pas isolé ; plusieurs personnes sollicitant la venue d’un de leurs enfants en France dans le cadre du regroupement familial l’a certainement vécu. Comme lui, ils jugeront donc que, s’il faut en plus passer le test ADN, ce serait « insupportable et inadmissible ». 

Un jugement que, malheureusement, n’arrivent pas à avoir ou à faire entendre les grandes associations des africains de France. Comme une autre preuve de leur inconsistance, ou de leur marginalisation ? 

Le test ADN ressuscité

Jeudi 4 octobre 2007

D’abord voté, ensuite supprimé, puis (re)voté. Voilà à ce jour les différentes décisions prises au sujet de « l’Amendement Mariani » portant sur l’instauration d’un test ADN pour les futurs candidats au regroupement familial en France. Un itinéraire en trois temps donc, dont le troisième épisode s’est écrit hier 3 octobre avec un nouveau vote, cette fois-ci, en faveur de l’amendement. Les sénateurs l’ont en effet adopté à une majorité relative (176 voix contre 138). Il y a un peu plus d’une semaine,
la Commission des Lois de l’Assemblée nationale avait voté pour l’instauration ; mais quelques jours plus tard,
la Commission des Lois du Sénat l’a supprimée. On pensait alors le dossier clos, et l’Amendement Mariani jeter définitivement aux oubliettes. Que non ! Hier, les sénateurs réunis en session plénière en ont donc décidé autrement. Pourquoi ce revirement ? Que s’est-il passé entre temps ? Y’aura-t-il un nouveau rebondissement dans ce dossier qui passe de plus en plus pour une « affaire » ? 
Les réponses sont assez simples. La première vient du « poids politique » donné à ce dossier. Le président Sarkozy avait fait de la lutte contre l’immigration clandestine et la maîtrise des flux migratoires un dossier prioritaire de son quinquennat. Tous les moyens sont donc bons pour arriver à cet objectif. Ainsi, dans la bataille qui a opposé les adversaires à cet amendement cité plus haut (essentiellement les députés de l’opposition et quelques-uns de la majorité) et ses supporters, l’exécutif a pesé de tout son poids. Hors le ministre de tutelle, Brice Hortefeux, le Premier ministre François Fillon est lui-même monté au créneau pour « convaincre » les parlementaires de voter pour ce texte. Message bien compris par ces derniers, qui, même en traînant les pieds, ont donc accepté de voter. Une autre raison pourrait être les « retouches » apportées à la mouture initiale de ce texte par les services du ministre de l’Immigration. Cette nouvelle version indique que, le Test ADN sera « volontaire », et non plus « proposé » aux candidats. Il sera aussi appliqué aux uniquement aux femmes et aux enfants, et non plus au « chef de famille » qui, selon, les mots d’un défenseur du texte, n’aurait pas à « connaître la surprise désagréable de constater par exemple que ses enfants ne sont pas…ses propres enfants ». D’autres modifications mineures ont aussi été apportées à cet amendement, sans pour autant le rendre plus lisible et même, bien accepté dans l’opinion. En effet, les soubresauts observés jusqu’ici sur ce texte montrent bien qu’il est complexe, et, pour le moins, sujet à disputes et polémiques. La classe politique, les milieux associatifs aussi, et même au sein des chercheurs, universitaires, professionnels de la santé (médecins, psychiatres, psychanalystes) les réactions ont été, et continuent même d’être antagonistes sur ce sujet. Même au sein de la communauté africaine en France, qui n’est pas en reste de cette affaire, puisque c’est essentiellement contre les africains que ce texte est dirigé (lire article à paraître lundi). Les médias aussi se sont émus de cette affaire, et, pour beaucoup, ont publié des pétitions des associations opposées à l’amendement en question. Mais comme d’habitude, dans ces cas, c’est toujours au politique d’en prendre la décision finale. Laquelle décision est, pour l’instant, favorable à cet amendement. Avant un nouvel épisode ? 

Le temps des récompenses, suite

Vendredi 28 septembre 2007

Dans le précédent texte au même titre, j’exposais les différentes situations qui rendent possibles Le temps des récompenses. J’ai terminé par le cas des victoires électorales. Sur ce sujet, j’ai évoqué les exemples des pays africains, où, les victoires électorales donnent lieu à plusieurs types de récompenses (produits alimentaires pour les plus « petits », strapontins et maroquins plus ou moins importants pour les « gros »). 

En France aussi la pratique n’est pas rare. On dira même qu’elle est, ces derniers temps, très accentuée. On sait déjà que, du fait d’une démocratie « effective », et donc, d’une vie politique bien organisée en bords (Droite, Gauche, Centre…), partis (RPR, PS, UDF…), courants, associations… les choses sont souvent assez claire avant même le début des différentes échéances électorales. Parce que, dans les formations politiques, des personnalités ou des groupes, en fonction de leur « poids électoral » et/ou de leur apport pendant la campagne, savent à peu près ce qui les attend comme décorations ou récompenses en cas de victoire. A quelques exceptions près, depuis le début de la Ve République, les gouvernements sont quasiment constitués avant les élections, et, connus des observateurs avertis (politologues, journalistes…).

Ainsi, de Georges Pompidou à Jacques Chirac, en passant par Giscard d’Estaing et François Mitterrand, c’était le cas. Certainement pas trop avec le général de Gaulle (tout au moins dans la deuxième partie de sa présidence); tant sa figure de « héros national », « libérateur du pays » écrasait la scène politique (de ses « camarades » et collaborateurs jusqu’au peuple), et, partant, l’élevait à une stature de « Commandeur », voire de « Père de la nation ». Ses successeurs n’ont pas été dans le même rapport avec leurs collaborateurs et leurs camarades. Ils ont cravaché ensemble pour arriver aux affaires. Et c’est donc à juste titre qu’ils ont partagé ensemble le « gâteau ». La répartition se faisant au prorata des « apports » de chacun, et, en fonction des calculs politiciens.

Mais, certains bénéficiaires de ces récompenses ont parfois été des « amis » ou des « copains » dont l’action politique en faveur du camp gagnant n’était que moindre. Il s’agit de tous ceux qui ont bénéficié du fait du prince pour se retrouver dans la cour des grands, bref, à « la mangeoire ». Un poste a même été créé dans l’organigramme gouvernemental, dans lequel le gros du contingent de ces « opportunistes » et copains se retrouvent régulièrement. C’est celui de Secrétaire d’Etat. « Sous-ministre » aux contours parfois mal définis, et, pour beaucoup, à l’action invisible, les secrétaires d’Etat sont, dans la Ve République en France, des gens cooptés pour « figurer » dans le gouvernement, sur la base d’éléments très subjectifs. Ce ne sont pas, en théorie, des poids lourds politique; ce ne sont pas non plus des grands « barons » régionaux. Mais, parfois, de simples personnalités dont le zèle et l’opportunisme sont primés par l’octroi de ce maroquin. Le pire c’est que, ils seront « aux affaires » avec une principale recommandation; se faire voir le moins possible, et toujours réaffirmer, sa fidélité, son attachement et son soutien indéfectible au Chef de l’Etat. Il est vrai que, cette recommandation s’est aussi appliquée à des ministres de moindre importance et parfois même, cas rare, à des poids lourds de certains gouvernements.

Cette attitude a consacré, pendant longtemps, les rapports (pervers) de domination et d’écrasement qu’il y a, en France, entre le chef de l’Etat et son gouvernement. C’est l’une des raisons pour lesquelles la France a été considérée comme une « monarchie républicaine ». Car, le président est, de fait, un monarque élu. Il a tous les pouvoirs, il entretient un rapport autoritaire et quasi-paternaliste avec les membres de son gouvernement, pourtant souvent eux-mêmes élus du peuple. Les seuls moments où cette logique est très peu évidente ont été pendant les cohabitations, car le président et le gouvernement (issu du groupe majoritaire à l’Assemblée nationale) n’étant pas du même bord politique. Le gouvernement étant lui, sous la tutelle du Premier ministre, issu de ses rangs. Les récompenses de complaisance sont donc moindres ici.

En conclusion, et, avant de passer à un cas pratique de ce thème (dans une prochaine livraison), l’on dira qu’une élection, quelqu’elle soit, demande beaucoup d’énergie, d’argent, de forces humaines et intellectuelles.  C’est un investissement individuel et collectif, dans lequel beaucoup « dépensent » énormément. Il peut être compréhensible que, après coup, les « récompenses » soient au rendez-vous. Que des gens qui ont « investis » soient payés en retour. Bref, comme un retour sur investissement pour justement tous ceux qui ont « dépenser ». Mais, quand on transforme des postes ministériels, administratifs en maroquins pour copains, c’est qu’il y a quelque chose qui va pas. Quand les vainqueurs d’un scrutin, tels des mercenaires, se ruent sur tous les postes « juteux » du pays, on peine à comprendre le sens de leur engagement politique et plus tard celui de l’honnêteté de leur gestion des affaires publiques. Pire, quand, parmi ceux-ci, ils se retrouvent des gens pour bénéficier de récompenses en fonctions et postes lucratifs, uniquement sur la base de la copinerie, alors la République est plutôt une vache à lait cocue; car des gens se nourissent de ses ressources de manière injuste. Ainsi, « Le temps des récompenses » est donc un moment, un esprit à banir des mentalités et des habitudes de notre société. Mais quand on voit certaines récentes nominations en France, on se dit que, malheuresement, cette pratique a encore des très beaux jours devant elle.

 

Le temps des récompenses

Mercredi 26 septembre 2007

Après la victoire d’une équipe, le partage des lauriers entre les joueurs. Après la battue des chasseurs, le partage du gibier aussi. Après un casse, le partage du butin entre les malfrats. Après la victoire électorale, le partage des postes de « mangeoire » entre « camarades ». Ces équations sont connues. Elles sont aussi vieilles que le monde, et, de tout temps, les humains y ont souscris. Dans la société actuelle, personne n’y déroge. surtout pas dans le dernier cas cité. En effet, les succès électoraux permettent toujours à ceux qui ont gagné (partis, coalition, associés…) de s’arroger le « gâteau » et de se le repartir, morceaux par morceaux, souvent jusqu’au miettes.

En Afrique, l’Equipe victorieuse (très souvent le parti au pouvoir) est souvent constituée de militants du partis, qui, dans leur majorité, ne sont en fait  que tous les fonctionnaires (des grands directeurs aux simples agents de l’Etat), les hommes d’affaires (des rentiers pour la plupart), les petits opportunistes, les « opposants » retournés (qu’on ne voit qu’en période électorale), mais surtout tous les « frères » du village. Ces derniers, qu’ils soient actifs ou pas, qu’ils aient un emploi ou non, ils ont toujours le bon réflèxe de voter pour le « frère » du village. Celui dont on leur aura dit à l’avance qu’il va résoudre tous leurs problèmes: chômage, électricité, eau, établissements scolaires, hôpital, terrain de foot… Parfois, pour ces petites gens, leurs récompenses, après qu’ils aient voté en masse pour ce « frère », est une récompense en trompe-l’oeil. Quelques sacs de riz, des pagnes et des bidons d’huile (en fait des produits de première nécessité) distribués au petit bonheur la chance. Cette distribution de cadeaux électoraux ne dépassera pas quelques jours, voire quelques semaines.

Pour les « gens plus sérieux », et quelques opportunistes zélés, la « mangeoire » sera plus consistante et durera plus longtemps. Des promotions dans l’administration pour les fonctionnaires, avantages fiscaux et marchés publics gagnés pour les « opérateurs éconiques » du privé, et quelques missions à l’étranger pour d’autres encore. Partout et pour tous, la manne se présentera et, en même temps que l’argent, d’autres avantages en nature viendront grossir le nombre de récompenses. Il va sans dire que tout ceci s’accompagnera de démesure totale, avec une folie dépensière qui ne se justifiera que par « les efforts consentis » pendant la campagne, ainsi que l’affirmeront les bénéficiaires. Eux, comme les petites gens à leur niveau, tout le monde se remplira donc la panse ainsi, pour savourer ce temps fastueux de la récompense électorale.

En France et en Europe, on est bien sûr loin de ce phénomène. Du moins dans cette version si caricaturale, villageoise voire complètement stupide. Après un sacre électoral, en discours, on ne (re)distribue pas les récompenses, les lauriers ou les prix au « amis », « camarades », « frères »… Mais dans la réalité, est-ce vrai? Qui peut penser que, après la victoire d’une équipe, même les joueurs défaillants ou remplaçants ne soient pas primés? Et quand cela se fait, est-ce de bonne guerre? Doit-on trouver normal que des gens puissent avoir des avantages administratifs, financiers, fiscaux…juste pour leur soutien à une candidature (alors même que chacun n’apporte qu’une seule voix)? Cette façon de procéder n’entérine t-elle pas le « système de rente » et ses avantages qui explique que certaines personnes soient souvent engagées avec beaucoup de « ferveur » et d’ostentation vers une candidature? Enfin, si on admet cela comme noramal et logique, peut-on arriver à faire avancer la démocratie de cette manière? Ou encore faire renouer les citoyens ordinaires avec la politique et ceux qui la font?  Ceci est un autre sujet que je commenterai dans un prochain article. 

Le test qui ne passe pas, suite et fin?

Mercredi 26 septembre 2007

Fin de vie pour l’ex-futur « test ADN » pour les candidats au regroupement familial en France? C’est ce qui pourrait arriver si l’on en croit les infos toutes fraîches. Il est un peu plus de 13h à l’heure où j’écris. La dépêche est tombée il y a moins d’une heure. Elle dit ceci: «  La commission des Lois du Sénat a supprimé ce matin l’article du projet de loi Hortefeux sur la maîtrise de l’immigration qui instaurait la possibilité d’un test ADN pour les candidats au regroupement familial, a-t-on appris de source parlementaire ». En attendant que cette infos soit confirmée, il me vient à l’esprit de rappeler que dans un article que j’ai publié ici même hier, je mentionnais les réticences d’une bonne partie de la classe politique contre ce test de la honte.

Chez les grands élus (Assemblée, Sénat) la quasi-totalité de l’opposition s’est élevée contre cet amendement proposé par le député Mariani (de la majorité). Même dans les rangs de la majorité, et même au gouvernement, les défenseurs de cette mesure étaient peu nombreux ou plutôt très discrets. Plusieurs psychiatres, juristes, militants associatifs, artistes de renom, se sont aussi indignés contre ce texte. Tous, ils ont souhaité que, même si le texte a été voté à l’Assemblée, que le Sénat ne l’entérine pas. Vraisemblablement, si on en croit la dépêche citée plus haut, le souhait de tous ces gens a été exaucé par la chambre haute du parlement français. Une décision somme toute juste, logique et cohérente. Car, l’amendement « proposant » le test ADN était une mesure inique, concoctée par un spécialiste des propositions discriminatoires pour, sinon jeter l’opprobre sur les immigrés candidats au regroupement familial, du moins faire déchaîner les passions dans ce pays sur un sujet (l’immigration) qui s’apparente de plus en plus à une poudrière.

Il faut espérer que, après la suppression de cet amendement, celui sur les « quotas » soit aussi supprimé, à défaut d’être débattu dans le calme et la sérénité. Et que, au final, ce soit tout le nouveau texte de loi, toutes les politiques récentes sur l’immigration (procédure de visa d’entrée, accession au droit au séjour, traitement des sans-papiers, procédure et quota d’expulsion…) qui puissent être abordées calmement et sereinement; bref autrement que ce qui se fait depuis quelques mois.

  

IMMIGRATION : Les tests ADN sur les étrangers divisent les politiques français

Mardi 25 septembre 2007

Un test qui passe mal. Pour l’instant c’est ce qui ressort des différentes réactions enregistrées au sujet d’un amendement à la nouvelle loi sur l’immigration en France, prévoyant de « proposer » à des candidats au regroupement familial un test ADN pour prouver leur filiation. L’amendement en question, déposé par le député Thierry Mariani a déjà été voté (en même temps que le reste du texte) à l’Assemblée nationale, le 20 septembre dernier. Mais il devra encore passer par le Sénat pour un autre vote, et enfin, ce sera au Conseil constitutionnel de l’approuver, le modifier ou le rejeter. 

Mais dores et déjà, le sujet déchaîne les passions, comme, du reste, c’est souvent le cas lorsqu’on parle d’immigration dans ce pays. La classe politique dans son ensemble est bouleversée par ce sujet, et, une fois n’est pas coutume, les oppositions d’opinion ne se font pas qu’entre majorité et opposition, mais aussi entre membres d’un même camp. C’est notamment le cas à Droite. Le parti de Nicolas Sarkozy (l’UMP) ne parle pas d’une seule voix sur ce sujet. Certes les voix discordantes sont, en nombre, beaucoup plus faibles que ceux qui soutiennent le texte de loi et son fameux « test ADN ». 

Plusieurs députés de la majorité se sont exprimés pour dire, leur gêne face à ce qu’ils considèrent comme une mesure « contraire à la morale », pour certains ; pour d’autres, « instaurer aux étrangers un test ADN pour prouver la filiation, c’est leur imposer quelque chose qu’on ne s’impose pas à nous même. Car en France, ce n’est pas la biologie (le test ADN) qui fonde la filiation, mais plutôt des éléments sociaux et administratifs ». D’autres encore sont allés beaucoup plus loin dans leur condamnation du texte, en dénonçant le fait que ce serait « une mesure discriminante et humiliante pour les étrangers qui veulent venir chez nous ; car on les postule au préalable comme des fraudeurs, qui, doivent faire un test ADN pour prouver leur filiation ». 

Bien d’autres arguments encore ont été avancés dans le sens de refuser cet amendement. Ce qui n’a pour l’instant pas beaucoup ému ses partisans, parmi lesquels le président Sarkozy ; ceux-ci avancent comme principaux arguments pour le soutenir, le fait que, d’une part, c’est « un moyen sûr et qui en plus fera accélérer la procédure pour beaucoup de candidats au regroupement familial » ; d’autre part, c’est une mesure qui est déjà applicable dans un grand nombre de pays européens, et, « 
la France aurait tort de ne pas la tester » a par exemple dit le ministre chargé du dossier Brice Hortefeux. 

Pour l’instant, rien n’est donc tranché dans l’opinion. Le sujet anime bien la rentrée politique et médiatique. Tous les jours, une chronique, une tribune ou un point de vue d’un homme politique, un leader associatif, un psychiatre ou psychanalyste, vient enrichir ce débat. Si on était sur le terrain sportif, on dirait que le match est serré, mais il y a un certain avantage des adversaires au test ADN. Néanmoins, la partie est loin d’être terminée. Car, après la première manche qui a eu lieu à l’assemblée, il faut attendre la deuxième manche qui se tiendra au Sénat. Elle sera décisive, avant le round final du Conseil constitutionnel. Qui, en dernier lieu donc, dira si, en plus de toutes les mesures déjà en vigueur, il faut également « proposer » le test ADN à ceux qui veulent venir en France. 

La (nouvelle) Francophonie en France

Jeudi 20 septembre 2007

Depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la république, la Francophonie est un peu la grande absente de l’action politique qu’il a mise en place depuis 4 mois. Elle est même carrément ignorée. Jusqu’ici, il y’ avait un ministère chargé de la Coopération et de la Francophonie; même si celui-ci n’était qu’un ministère délégué. Aujourd’hui, il y a eu déclassement, car, c’est un Secrétariat d’Etat qui assure la compétence de ces secteurs. En plus de cela, le porte-feuille a été confié à Jean-Marie Bockel, venu des rangs du PS; celui-ci, depuis qu’il a été nommé, se balade de pays en pays sans propositions concrètes sur la Francophonie nouvelle annoncée par M. Sarkozy dans sa tribune publiée le 20 mars dernier dans Le Figaro, le jour de la Journée mondiale de la francophonie (cf.

Jean-Marie Bockel donc, quand il n’est pas en voyage à l’étranger, férraille plus tôt ici sur la justification de sa présence au gouvernement, et les accusations de traîtrise qui lui sont lancés par ses anciens amis du PS et par certains journalistes. Il y est tellement occupé que, consacrant une grande partie de son temps à son avenir politique, plutôt qu’à la charge qui lui a été confiée, il « manoeuvre » dans son Haut-rhin natal pour créer une nouvelle formation politique rassemblant « la Droite, la Gauche, le Centre » aux prochaines municipales. Ses principales interventions médiatiques sont quasi-toujours au sujet des municipales de l’an prochain, où il compte bien se représenter à la mairie de Mulhouse. Quel temps consacre t-il à la mission qui lui a été confiée? Il répondra certainement que, pour ces domaines (Coopération et francophonie), il travaille dans la discrétion. Soit.  On attendra encore un peu avant de juger davantage.

Pourtant, à notre avis, le poste aurait du être confié à Rama Yade. Non parce qu’elle a quelque chose de spécial, mais parce que, si nos souvenirs sont bons, elle était présentée dans les médias (et Dieu seul sait combien elle y était présente) pendant la campagne présidentielle comme Secrétaire nationale de l’UMP chargé de la francophonie. Ce ne devait pas être un contre-sens, car, on a bien vu que Rachida Dati, magistrate, a été nommée à la Justice; Fadela Amara, militante sociale, au Logement et Quartiers (quelque chose du genre)… Pourquoi Rama Yade n’a t-elle pas été nommée à un poste où elle était sensée être compétente? « Secrétaire nationale à la Francophonie de l’UMP », etait-ce un emploi fictif, juste pour lui coller un titre? Ou alors n’avait-elle pas le profil nécessaire pour prolonger au gouvernement un travail dont elle était chargée dans le parti? Difficile à dire. Mais, vraisemblablement, il se pourrait que, malgré ses grandes qualités, le parti qui l’emploie n’ait voulu que profiter de son image et de sa belle frimousse. Et ils y sont parvenus, non sans rappeler à la Gauche qu’ils étaient les premiers à donner, à travers elle et les deux autres citées plus haut, la chance aux « minorités visibles ».

Entre temps, la Francophonie est un non-sujet, ou plutôt un sujet tabou pour ce gouvernement. Dans le brouhaha actuel sur l’immigration, pas une voix qui s’élève pour dire qu’il est insensé de faire passer des tests de français à des ressortissants francophones qui souhaient émigrer en France. Pas une voix non plus pour reprendre à son compte les promesses de plus de coopérations avec les pays francophones du sud, dans des domaines précis comme la coopération universitaires, le visa francophone pour les étudiants…

En ces temps de chasse au sans-papiers, de test ADN pour les candidats au regroupement familial, mais aussi de débat sur le nucléaire iranien, sur le réforme des retraites et autres, il ya très peu de chances ques les médias en parlent. Car, qui pour l’évoquer au sein du gouvernement ou même dans la majorité? Et, plus globalement dans la classe politique française? A ce jour, la première personnalité politique d’envergure à (re)parler de Francophonie, et avec un langage nouveau, c’est… Ségolène Royal. L’ancienne candidate à la présidentielle, en visite au Québec en cette mi-septembre, a plaidé pour une Francophonie renforcée à travers le monde. Parmi les propositions qu’elle a avancées, la création d’une Université francophone internationale, et d’un système « Erasmus* francophone« ; mais aussi, un contrat politique entre les pays membres de l’Organisation internationale de la francophonie pour protéger l’environnement.   

Ces propositions, nous espérons que le gouvernement actuel les récupère, et que Jean-Marie Bockel, Rama Yade ou tout autre, les mettent sur la table du président Sarkozy, afin qu’elles soient réalisées pendant son mandat. Afin que la nouvelle francophonie en France puisse prendre (enfin?) forme. Afin que, d’un sujet de seconde voire de troisième zone, la Francophonie puisse (re)devenir (enfin aussi?) un thème important dans la société française. C’est un pari politique, mais aussi un défi culturel, qui ne pourra, à terme, q’u'être bénéfique à tous les français et tous les francophones de France et d’ailleurs. 

* Erasmus est le nom donné au programme d’échange d’étudiants et d’enseignants entre les universités et grandes écoles européennes. 

Emigrer en France: bientôt le test génétique pour les africains?

Vendredi 14 septembre 2007

Ca devient une obsession. Le sport favori de quelques illuminés de la politique française, qui, faute de pouvoir mener à bien les affaires internes de ce pays pour lesquels ils ont été élus, ont choisi de faire diversion (au mieux) ou de taper sur des faibles (au pire) afin de faire l’actualité et de montrer que « les choses vont bouger » selon l’expression-culte consacrée désormais pour renseigner la volonté et l’action politique des gouvernants français. La dernière trouvaille de ces « élus du peuple », c’est la « traque » des immigrés africains vivant ou désireux de vivre en france. Il faut tout faire pour empêcher l’africain demandeur de visa pour la France d’y arriver un jour. Pourtant, celui-ci n’avait déjà pas la tâche facile quand il souhaitait rejoindre l’hexagone: on lui demande une batterie de documents dont l’utilité de certains n’a jamais été démontrée. Bien plus, il y’avait déjà les tracasseries liées à l’obtention d’un rendez-vous dans les consulats français en Afrique, les cautions financières exorbitantes, les difficultés à trouver un certificat d’hébergement ou d’accueil en France, et bien d’autres encore. Désormais, en plus de tout ceci, il devra en outre « subir » un test ADN s’il veut venir en France dans le cadre du regroupement familial.

C’est la proposition faite par le député UMP Thierry Mariani dans un texte qui a été voté à la commission des lois de l’Assemblée nationale le 12 septembre. Ce texte sera débattu plus tard, en même temps que d’autres amendements relatifs au énième projet de loi proposé sur l’immigration en France. Je dis bien le énième parce que depuis 2002 et le retour de la Droite au affaires, plusieurs textes ont été votés pour « réguler » et « maîtriser » l’immigration en France. Pratiquement chaque année, il y’en a un, nouveau, ou « réchauffé » (amendé), qui est mis sur la place publique. Sans jamais faire le bilan de l’efficacité ou non du précédent les ministres de l’intérieur qui se sont succédés depuis mai 2002 (en fait il y en a eu que deux, Nicolas Sarkozy pendant 4ans et Dominique de Villepin, 1 an), n’ont fait qu’empiler les textes, dans le seul but avoué que de créer les conditions légales pour bouter hors d’ici ceux qui y vivent mal, ou ceux qui veulent venir. A t-on jamais fait le bilan de cette politique depuis cinq (5) ans? S’est-on jamais demandé, par une étude au cas par cas (qui est possible dans ce pays) qui de ces « hors-la-loi » était utile à son niveau à la France? A t-on cherché à orienter, discuter, proposer à ces « gens » des conditions d’épanouissement personnel ici (par la régularisation puis le travail dans le cadre d’un contrat qui leur ferait, à la fin de leur boulot rentrer chez eux avec un peu d’économies)? S’est-on jamais posé la question de savoir si, le « clandestin », après avoir été régularisé ne devenait pas plus un atout, une chance pour la France (pas tous certainement, mais en terme de pourcentage)? Enfin pourquoi n’a t-on jamais voulu suivre l’exemple de ceux des pays qui régularisent en grand nombre ceux qui chez eux travaillent déjà, même si c’est dans la clandestinité, et qui, dès lors, contribuent à l’essor économique du pays dans lequel ils vivent? Autant de questions dont les réponses sont simples et pratiques, mais que personnes, surtout pas les dirigeants actuels ne veulent aborder.

  

Revenons à cette nouvelle choc de Test ADN ou test génétique (c’est selon) dont nous parlions en début de texte. Son initiateur, cité plus haut, affirme que, ce procédé va permettre de traquer la fraude importante qu’on observe dans les documents des demandeurs de visa qui viennent en France au titre du regroupement familial. Il avance pour preuve un argument du rapport d’un sénateur UMP qui affirme que « 30 à 80% en des actes d’états civils fournis dans certains pays d’Afrique (subsaharienne) sont frauduleux ». Et, puisqu’on ne peut pas toujours vérifier l’authenticité de ceux-ci, alors, l’une des solutions « fiables » dit-il, pour savoir si par exemple, un enfant qui désire rejoindre des parents en France est bien leur fils, il faut lui « demander de réaliser à ses frais, un examen génétique montrant son lien de filiation avec ceux-ci ». Poursuivant son argumentaire, et, question de lui ajouter un zeste d’humanité, le député en question avance que « cela fera gagner du temps à ces demandeurs de visa familial qui attendent souvent plus d’un an pour qu’on étudie leur dossier, alors que là, au bout de 2 semaines, les résultats sont connus ».

La proposition du député Mariani, on le devine bien, arrive dans un contexte où, le moins qu’on puisse dire, le nouveau pouvoir en place a décidé de partir à la chasse des immigrés clandestins (particulièrement les africains), et de durcir (le mot n’est pas assez fort) les conditions d’entrée des étrangers en France. Nous ne reviendrons pas sur tous les textes et mesures, en ce sens, qui ont été mis en place ces dernières années. Nous insisterons tout simplement sur le fait que, coïncidence (?), cet amendement arrive sur la place publique au lendemain du jour où le ministre de l’immigration a convoqué certains préfets pour leur rappeler de pratiquer plus d’expulsions d’étrangers en situation irrégulière. Cette recommandation, on s’en souvient, était une promesse de campagne du candidat Sarkozy. Il avait exprimé le voeu de reconduire chaque année un nombre important d’étrangers vers leur pays d’origine; pour cette année 2007, le chiffre a été fixé à 25 000. Et l’année prochaine, il sera augmenté, et après encore plus, et toujours plus encore… Jusqu’où? Ceci est un autre sujet que nous aborderons en temps opportun.

La coïncidence que je soulignais tout à l’heure (réunion des préfets et proposition Mariani) ne doit rien au hasard. Elle est une action commandée en haut lieu pour faire oublier les premières difficultés du nouveau gouvernement dans sa gestion des affaires publiques. En quelques semaines effectivement, quelques couacs sont venus troubler la tranquillité et le ronronnement qu’on observait depuis la fin des législatives et qui se sont poursuivis tout au long de l’été. En vrac, on peut citer les ratés diplomatiques (la sortie maladroite de Bernard Kouchner sur le remplacement du Premier ministre irakien, ce qui lui a valu de s’excuser publiquement auprès des autorités irakiennes pour cette immixtion dans leurs affaires internes), le décollage toujours attendu de l’économie, la stagnation du taux de chômage. Bien plus, sur le plan de la sécurité, quelques « affaires » sérieuses comme l’agression sexuelle d’un mineur à Roubaix dans le Nord par un pédophile multirécidiviste, et, aussi, les affrontements entre « bandes » de jeunes (majoritairement originaires d’Afrique, certes) et le meurtre d’un épicier en banlieue parisienne, ont fait rappeler que la baisse de la délinquance et de l’insécurité, annoncée en grande fanfare en mai, n’était peut-être qu’un slogan de campagne. On ajoutera à cela les quelques querelles de personnes entre le Président et son premier ministre, ou encore entre certains ministres entre eux sur des sujets qui pourraient passer pour secondaires, mais dont la médiatisation les a rendus important.

Tout ceci donc ne rend pas le climat de rentrée favorable au pouvoir en place. Et, question de faire oublier cela, ou de les reléguer à l’arrière plan, on assiste donc à une « offensive » sur un sujet qui qu’on juge extérieur, mais dont l’impact dans l’opinion est toujours important. Et c’est ainsi donc que, en l’espace de quelques jours, l’immigration refait surface en première ligne dans l’actualité en France. On ne redira jamais assez que, il est, sinon malsain, du moins complètement stupide de toujours attaquer cette question de cette manière; c’est-à-dire en stigmatisant l’étranger, en le faisant passer pour un fraudeur et un tricheur invétéré. La lecture entre les lignes de la proposition du député Mariani montre en effet que, la quasi-totalité des africains qui sollicitent un visa pour regroupement familial sont des fraudeurs. Et pour cela il faut les tester comme des cobayes pour savoir s’ils disent vrai sur leur filiation ou pas. Peut-on pratiquer, je dirai même proposer cela à d’autres immigrés venus d’ailleurs? Certainement pas. En outre, une telle pratique est contraire à la loi française; l’article 16 du Code civil indique en effet que « l’étude génétique des caractéristiques d’une personne ne peut être entreprise qu’à des fins médicales ou de recherche ». La demande de visa ne fait donc pas partie des situations dans lesquelles le test génétique peut être pratiqué. En outre, comme l’indique un député opposé à cela, « ne le pratiquer que sur les africains, laisserait croire qu’on veule procéder à un fichage ethnique ». C’est peu dire, au regard de tous ce qui est déjà pratiqué sur les immigrés ou les originaires d’Afrique subsaharienne en France. 

Il faut donc espérer désormais que, lorsque ce texte sera débattu en séance plénière à l’assemblée nationale, qu’il soit purement et simplement rejeté. Car, il est contraire à tous les principes éthique, pratique… Car, également, s’il venait à être entériné, alors il deviendrait un précédent qui pourrait, à l’avenir, inspirer d’autres pratiques du genre, où, par exemple, on demanderait, non plus au demandeur de visa cette fois-là, mais à toute personne de faire un test génétique pour justifier que l’enfant qui porte son nom et qu’il élève légalement est bien le sien.

De l’amour de la France

Mardi 4 septembre 2007

Aimes-tu la France? Aimons-nous la France, devrais-je dire? « Nous », c’est tous ceux qui vivent en France; de nationalité française ou pas. Je dirai même, surtout de nationalité étrangère.

A l’occasion des dernières campagnes électorales, beaucoup de candidats majeurs ont recommandé presque à l’unisson « d’aimer la France ». Certains sont même allés jusqu’à ajouter que, « il fallait aimer la France ou alors la quitter ». Pas besoin de commentaires pour comprendre une telle phrase, ses non-dits… Je ne souhaite pas non plus commenter cette phrase et la thématique qui l’environne dans une vision franco-française (je ne le suis d’ailleurs pas). Simplement, il me paraît important d’analyser à ma manière cette assertion qui est aussi à la fois comprise parfois comme, d’une part, une mise en demeure au étrangers de France, d’autre part, une recommandation pour les français.

Au hasard de l’une de mes lectures, je suis tombé sur un sonnet de Joachim De Bellay (1522-1560) au titre fort évocateur de « France, mère des arts, des armes et des lois ». Ce sonnet, c’est le neuvième (9e) d’un recueil à succès de ce poète de la Renaissance, Les Regrets, publié en 1558. Pour bien l’intégrer dans le commentaire que je vais faire, et qui corroborera bien mon propos sur « l’amour de la France » que les hommes politiques nous recommandaient de manière véhémente pendant la dernière campagne présidentielle, je vais citer ce poème dans son entièreté.

France, mère des arts, des armes et des lois,
Tu m’as nourri longtemps du lait de ta mamelle :
Ores, comme un agneau qui sa nourrice appelle,
Je remplis de ton nom les antres et les bois.
Si tu m’as pour enfant avoué quelquefois,
Que ne me réponds-tu maintenant, ô cruelle ?
France, France, réponds à ma triste querelle.
Mais nul, sinon Écho, ne répond à ma voix.

Entre les loups cruels j’erre parmi la plaine,
Je sens venir l’hiver, de qui la froide haleine
D’une tremblante horreur fait hérisser ma peau.

Las, tes autres agneaux n’ont faute de pâture,
Ils ne craignent le loup, le vent ni la froidure :
Si ne suis-je pourtant le pire du troupeau.

Que constate t-on à la lecture entre les lignes de ce poème, qui, pour rappel, a été publié il ya près de cinq siècles (500 ans)? Que l’amour de la France, par les français, (Du Bellay en est-un de bonne souche), ne va pas toujours de soi. Le poète, ici, certes exilé à Rome au côtés de son oncle, le Cardinal Joseph du Bellay, se languit et désespère de retrouver sa terre natale. Car son pays lui manque, et plus précisément sa terre d’Anjou (voir précisemment ici le sonnet 31). Mais en même temps, si la France lui manque (il reconnait noramment, dans le 2e vers, la préciosité de son  »lait » nourricier), il s’étonne aussi du silence de sa patrie à son appel au secours, traduit ici au vers 6 par cette question quasi-supplicatrice (« que ne me réponds-tu maintenant, ô cruelle? »). Certainement sans réponse, le poète poursuit sa complainte et son appel au secours, par une interpellation plus directe, sur le mode de la personnalisation, aux vers suivants, 7 et 8 (« France, France, réponds à ma triste querelle // Mais nul, sinon écho, ne réponds à ma voix »). La fin du sonnet, est le déroulé du spleen du poète, teinté d’amertume, de dépit, et surtout de crainte. La crainte que l’abandon de sa « mère nourricière », la France, ne le condamne au sort de l’agneau qui erre au milieu d’un troupeau de loup.

Dans ce texte, « l’amour de la France » du poète ne semble pas être vraiment transcendant. Il l’aime, certes, mais pas d’un amour inconditionnel et éternellement fidèle. On a l’impression qu’il l’invoque davantage pour se tirer d’affaire (ici précisément de son ennui et de son exil romain), que pour lui dire « je t’aime, bon gré, mal gré ». Néanmoins, il proclame être attacher à cette France, qui, naguère, l’allaita, mais qui, à présent, lui ferme ses oreilles et son coeur.

Depuis quelques années, et de manière plus accrue pendant la campagne à l’automne dernier, « on » (politiques, journalistes, sondeurs, « français de base »…) a beaucoup reproché aux petits-fils d’immigrés africains et maghébins de ne pas « aimer assez la France ». « On » a relevé leurs problèmes, passé au crible leurs hobby, tenue vestimentaire et autres; surtout, « on » a mis en avant les propos, trop souvent de manière exagéré, les propos de quelques-uns d’entre-eux qui vociféraient des « Nique la france ». A t-on jamais cherché à savoir réellement pourquoi ils proféraient de tels jurons? S’est-on demandé pourquoi certains arboraient des effigies du pays de leur parents ou grand parents sans jamais rien savoir de ces lieux qu’ils n’ont souvent jamais visité? Non.

Bien au contraire, « on » leur a même dit « la France vous aime. Vous devez l’aimer aussi, d’un amour inconditionnel, sans même vous soucier parfois de ce qu’elle vous apporte dans la concrétisation de vos rêves, dans la mise en route de votre vie d’homme, dans votre épanouissement social, professionnel aussi. On leur a commandé « aimez la france »! Comme si cela allait de soi; ou pis, comme si aimer la France était une panacée, une espèce d’antidote voire de remède miracle qui aiderait la majorité de ces jeunes, tiraillés entre le chômage, la miserre intellectuelle et finacière, ainsi que la perte de répères et de valeurs, de s’en sortir. 

Pour l’instant, ces jeunes, dans leur for intérieur, ne semblent pas avoir sacrifier complètement l’amour pour la France, leur pays. Mais ils attendent en retour, d’autres preuves d’amour de cette terre qui les vit naître et grandir. Ils attendent un geste d’elle, qui souvent, ne tient qu’à une seule chose : Un Emploi. En attendant, ils expriment leur spleen, leur mal être, leur désaffection, circonstanciée, de cette France, leur patrie. En cela, ils sont dans la droite ligne de…Du Bellay, qui, Cinq (5) siècles avant eux, le dit, et le fit aussi. 

La mort d’un Baron de la Françafrique

Mercredi 29 août 2007

Pierre Messmer est mort ce jour. Coïncidence, c’est le jour ou est inhumé Raymond Barre, décédé lui-même il y a quatre jours. En l’espace de quelques jours, deux grands commis de l’Etat français sont ainsi « partis ». Deux barons de la Françafrique aussi. c’est ce dernier aspect qui nous intéresse.

Si l’implication de Raymond Barre (Premier ministre français de 1976 à 1981) dans les affaires africaines a été plutôt discrète, voire moindre, celle de Pierre Messmer fut ô combien importante. Il est même considéré par certains observateurs avertis comme l’un des principaux ténors de la politique française de l’Afrique sous l’ère De Gaulle, Pompidou, et Giscard. Pour avoir une idée de « l’activité » de cette personnalité sur le continent africain et dans les autres colonies françaises, il faut se reporter à ce paragraphe du quotidien français Le Monde :

« A partir du début des années 1950, il parcourt l’Afrique. Il est gouverneur général de Mauritanie puis de Côte d’Ivoire avant de devenir haut-commissaire de la République, au Cameroun d’abord, en Afrique équatoriale française ensuite, en Afrique occidentale française enfin.

Entre deux missions, il dirige, en 1956, le cabinet de Gaston Defferre, ministre de la France d’outre-mer et auteur d’une loi-cadre qui donne aux territoires coloniaux l’autonomie interne, premier pas vers l’indépendance. Dans ses différents postes, Pierre Messmer prépare la décolonisation. D’où le titre de cet autre livre, paru en 1998 : Les Blancs s’en vont. « Le colonisateur le plus habile n’efface pas le sentiment national quand il existe », souligne-t-il. Il écrit aussi : « Le colonial que j’étais est ainsi devenu acteur de la décolonisation ». En 1959, il quitte Dakar, dernier gouverneur général de l’Afrique occidentale française. « Avec vous, lui dira François Jacob, c’est la France qui évacue ses colonies d’Afrique. Une ère s’achève ».

La figure de Pierre Messmer est donc, jusqu’à un certain degré, intimement liée à une période de l’histoire de l’Afrique. Et il ne s’agit pas d’une période rose ou gaie. Car, comme on vient de le voir dans le bref résumé sus-cité, il a été présent sur le continent à la fin de la période coloniale. A cette époque, il y a occupé d’importants postes de responsabilités: Gouverneur de plusieurs pays notamment. Quand on revisite l’histoire du continent à cette période-là, et qu’on prend connaissance de l’ampleur des « dégâts », répressions, violences, tortures et autres qui ont été commis sur les peuples « indigènes » par l’administration coloniale, on ne peut que constater que ce Monsieur, vu le poste qui était le sien, a participé de manière directe à ces exactions.

Il ne serait dans l’intérêt de personne aujourd’hui de faire un procès en histoire à M. Messmer. Mais, rappeler des éléments comme celui-ci sont bien pour que, dans le concert d’hommages « émouvants » qui lui sont rendus aujourd’hui, que personne n’oublie qu’il fut aussi un méchant tortionnaire. 

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